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01/10/2008

ET LE LOUP S’UNIT À LA CHIENNE…

La légende s’est souvent mêlée à l’histoire pour baptiser au cours des âges les noms de lieux et de rivières qui nous ont été transmis. Aujourd’hui devenus familiers, leur origine s’explique souvent par des événements que les spécialistes de la toponymie s’efforcent de retrouver à travers le passé.

L’appellation du petit fleuve Loup, qui s’étire à l’ouest du département des Alpes Maritimes sur plus de cinquante kilomètres, ne pouvait manquer d’attirer notre attention dans une chronique destinée à cet animal.

La rivière le Loup prend sa source sur les hauteurs d’Andon. Elle arrose au passage plusieurs communes à qui elle prête son nom: Bar­-sur-Loup, Pont-du-Loup, Tour­rettes-sur-Loup, La Colle-sur­-Loup, et même Villeneuve-Lou­bet.

Ce qui n'est au départ qu'un petit ruisseau devient bien vite un fleuve, grâce au concours de nom­breuses résurgences et petits affluents. Son débit intéressant permettra, au cours des siècles, le développement de certaines activités commer­ciales ou agricoles. Des cultures, des moulins, une papeterie, une production hydroélec­trique, la pêche, le tourisme et par-là même de quoi stimuler l'économie locale.

D’après des textes anciens, l’origine de ce nom viendrait de ce que cette vallée était connue pour être infestée de loups. Les attelages ou les bergers et leurs troupeaux à l'heure de la trans­humance évitaient donc de l'em­prunter, préférant se diriger vers Castellane en passant par Grasse. D'où ce nom donné à la rivière aux gorges profondes.

Pourtant, au-delà de cette explication traditionnelle, il faut remonter à l’Antiquité pour parvenir au contexte historique qui préluda à la désignation du fleuve Loup.

Voici la situation résumée par J.-R. Palanque, dans son  Histoire de la Provence (Privat, éditeur, 1969).

« Un ambassadeur romain débarqué à Aegitna (sans doute Cagnes) ayant été agressé et blessé par les Ligures de l’endroit, l'armée du consul Quintus Opimius vient le venger, après avoir franchi l'Apron (sans doute la Cagne, ou peut-être le Loup), elle livre bataille dans la plaine de la Brague en -154. Aegitna est prise d'assaut, les tribus ligures des Oxybiens et des Déciates sont soumises. Rome reconnut alors aux Marseillais la possession du territoire côtier, du rocher de Monaco à l'embouchure de l’Argens. »

En 1970, à l’occasion d’un colloque à Cannes relatif à cette bataille d’Aegitna décrite par Polybe, M. Le Bourdelles, spécialiste de l’Antiquité provençale, donne une opinion autorisée sur la topographie des lieux.

« Quant au Loup, on peut toujours s'amuser à dire que les Romains l'appelaient APRI-ONNA « la rivière», ou « le fleuve du sanglier » qu'après leur victoire, ils appelèrent « la rivière de la Louve romaine », Lupae-onna, à retrouver aussi dans Villeneuve-Loubet, connu par son château (84 m d'altitude) ».

Quant au  Loubet, de Villeneuve Loubet, selon Dauzat-Rostaing, (Dictionnaire. des noms de lieux de France, 1963), il procéderait également d'une modalité de lupus, comme le nom même du Loup.

Les multiples La Loubère (Htes-Pyrénées), La Loubière (Aveyron), Loubières (Ariège) etc... s'expli­quent par un primitif Lup-aria « endroit hanté par les loups ». Loubajac (Dordogne) vient de lupidiacum, Loubens (Ariège) du nom d'homme latin Lupus adopté par les Wisigoths et muni de suffixe germanique - ing. Loubersan, dans le Gers, est un ancien Lupercianum, Louvercy (Marne) est attesté sous la forme Lupercianum en 850. Enfin Loubeyrac (Puy De Dôme), Lobairac en 1154, vient de Luparius-acum, Lupariacum.

En Provence, il est vrai, de telles formations sont rares: signalons l’importante colline dominant la vallée du Loup et qui porte le nom de « colle loubière » en provençal ou colline aux loups.

Car, en provençal, la louve se dit « la louba », le gros mâle « le loubas » et le louveteau « le loubet ». (la terminaison des mots en « et » étant  diminutive).

On ne peut guère citer, avec la Loubière de Sauze (canton de Guillaumes) que le Loubet dans Villeneuve-Loubet ainsi que la Loubiane à Vence et Louve, commune de la Celle, canton de Brignoles,  cité par M. Ch. Rostaing (Toponymie de la Provence, 1945), selon lui, dérivée de LVPPO.

Précisons, que le Loubet apparaît dès 1152 dans les actes des évêques d’Antibes comme le « Castro Lobet », en 1155 « Castri Lupi », vers 1200 comme le Lobeto selon H. Bouche, puis en 1242 et 1251 comme le « Loubeto ».

En –154, selon l’historien grec Polybe, Opimius venu de l’Est avec sa troupe procède à un mouvement continu vers l'Ouest. Le premier cours d'eau important qu’il rencontra après le Var fut donc la Cagne, modeste rivière aujourd'hui rivière plus abondante, sans doute, il y a vingt et un siècles.

Cagne est aussi un hydronyme intéressant. Il ne faut point penser, comme certains que ce nom qu’il dériverait de « canne », « roseau», sous prétexte que, comme tous les torrents de cette côte, la Cagne se terminait par un estuaire maré­cageux.

Les Provençaux d'autrefois donnaient une autre explication.

Honoré Bouche nous apprend que ce petit fleuve, qui baigne à l'est le pied de la butte de Cagnes, fut baptisé par les premiers voyageurs qui remontèrent à sa source, laquelle, en sortant du flanc sud-est du Cheiron, vers Coursegoules, fait un bruit de chien, « la chienne ».

De fait, Can, Cagna, Cagnolo, Cagnoto sont les formes de langue d'Oc dérivées de canis. Le Cartulaire de Lérins mentionne ce cours d'eau dans un acte de 1012

«flumen Cagne ».

Cagna serait étymologiquement identique Nahr-el-Kelb, « le Fleuve du chien » de la Phénicie.

La table de Peutinger, première carte géographique de l’Antiquité, présente dans la partie actuelle des Alpes Maritimes un autre hydronyme dérivé d’un nom d’animal le flumen Vulpis, le fleuve du renard, lequel paraît être le Var dans sa partie supérieure, au nord de son confluent avec la Tinée. L’imprécision de la carte peut aussi laisser supposer qu’il s’agisse de la Vésubie ou de la Tinée ?

Pour la partie ouest du Var, il apparaît à la lumière de ces analyses que les deux fleuves suivants, la Cagne (la chienne des anciens) et le loup (baptisé ainsi par les Romains victorieux), s’unissent dans les eaux de la Méditerranée comme auraient pu le faire leurs éponymes. 

Le fleuve Loup prend sa naissance dans le massif de l’Audibergue, avant de progresser à l’est, pour poursuivre vers le sud en creusant de magnifiques gorges dans le massif calcaire des Préalpes de Vence.

Voici comment ce site est présenté avec un intérêt évident par les premiers guides touristiques. ( Baedeker, 1906 et Diamant, 1930).

-« On arrive dans la vallée du Loup, où la voie fait un circuit au N., traverse un petit tunnel et passe sur un viaduc de 310 m. de long et 55 m. de haut, en courbe de 200 m., à l'extrémité des gorges du Loup, situées à droite.

38 kil. Le Loup (231 m.), halte à l"extrémité O. du viaduc.

Les *gorges du Loup sont un défilé très pittoresque, de 4 kil. de lon­gueur, curieux par ses rochers et ses cascades. Route de voit. en construction. On y descend de la halte en passant sous le viaduc. Dans le bas, sur la route de Nice à Grasse, est Pont-du-Loup, groupe de maisons avec le Gr.-H. du Loup (Bertrand), l'hôt.-restaur. de la cascade (Gasagnaire; 10 ch. à 3 fr., déj. 3, dîn. 4) et deux autres restaurants (truites). On prend là, près du pont, un sentier généralement bon sur la rive g. du Loup, qui a sa source près de Thorenc. L'entaille que le torrent s'est creusée dans le calcaire atteint plus de 400 m. de profondeur et le sentier s'élève peu à peu entre des murailles de rochers à une grande hau­teur au-dessus du lit où il bouillonne. Dans la paroi O., à une grande hauteur, le canal du Foulon, taillé dans le roc. Une partie de ses eaux alimente l'usine électrique sous le viaduc; le reste est conduit à Grasse. On traverse deux fois le Loup (entre les deux ponts, sur la rive g., l'anc. ermitage de St-Arnoux). A env. 1 h. de la route, la cascade de Courmes (petit restaur. sous le surplomb), de 70 m. de haut et fort belle, où s'arrêtent la plupart des visiteurs. 1/2 h. plus loin, une autre cascade d'un accès moins facile (guide utile), le Saut du Loup, haut de 25 m.

Sur la hauteur à g., à l'entrée des gorges, est le village de Gourdon (760 m.), où l'on monte de Pont-du-Loup en 1 h. 1/2 par un sentier dit à la fin le chemin du Paradis. Belle vue de la place devant le château fort. De Pont-du-Loup, on fait aussi, en 2 h. 1/2-3 h. au N.-E. (guide, 10 fr pour l'excursion entière), l'ascension du Mont-Courmettes (1248 m.), d'où la vue est très étendue. Descente de là en 1 h. 1/4 à Courmes et retour par les gorges à la station (50 min.). » (Beadeker, 1906)

-« Gorges et cascade du Loup (ch. de fer de Provence, 11 k., jusqu'à la halte, du Loup, route 9 k. 5 jusqu'au Pont-du-Loup; - tram èlectr. jusqu'au Bar). - De la halte du ch. de fer, on descend à dr. après le viaduc et on aboutit sur la route au Pont du Loup ; groupe de maisons (hôtels et restau­rants) on franchit le Loup avec la route et au-delà. du pont on prend, à gauche sur la route de Vence, la nouvelle route qui passe sous le viaduc. Celle-ci remonte les magnifiques gorges du Loup, clues longues de 10 k., que les eaux du Loup, bondissant sur de gros blocs, ont lentement creusé dans un plateau calcaire.

Cette profonde entaille, que l'on voit des hauteurs environnant Cannes et Antibes, à plus de 20 k. à. vol d'oiseau, est l'une des curiosités naturelles les plus remarquables des Alpes-Maritimes et l'un des traits les plus saillants du relief de la contrée.

On passe (1 k. 250), sur le Pont de Baou-Bouyé, puis (1 k. 700) sous les encorbellements des Barres du Lauvas, et l'on arrive à. l'improviste (3 k.)en face de la Cascade du Pas de l'Echelle ou de Courmes, tombant d'un seul jet d’une paroi de 40 m.  On traverse alors un petit tunnel, puis (3 k. 100) le pont de Courmes (24 m. d'ouverture, arc élégant en maçonnerie à 35 m. au-dessus du torrent). Au-delà, sur la rive dr., on atteint (3 k. 700) le tunnel du Revest. A l'entrée de ce tunnel, remarquer les stalactites, et à la sortie à dr. la chute dite le" Saut du Loup" (restaurant Mi1lo).

-5 k. 200. Réservoir de l'usine hydro-électrique. - 5 k. 500. A dr. réservoir de Bramafan (alimentation de la ville de Cannes en eau de source). - 5 k 670. A dr. pont de Bramafan, et a g. chemin de gr. communication n' 12.

En franchissant le pont, et en continuant de remonter le Loup (cette partie des gorges est moins remarquable) on irait à Thorenc par Grèolières ou à Roquesteron. Pour aller à Grasse, il faut, avant le pont, tourner à g. et prendre la route qui, montant en corniche au-dessus des gorges passe au village de Gourdon, véritable nid d'aigles perché à 760 m.. au milieu d'un paysage calciné, sur une terrasse d'où la vue est surprenante. De Gourdon la route (descente sinueuse) rejoint la route Nice-Grasse à 6 k. de Grasse. »(Diamant, 1930)

Après ce pittoresque défilé, le Loup s’assagit pour franchir les gorges moyennes puis couler calmement vers la mer entre les sages collines de La Colle et Villeneuve-Loubet. Son estuaire qualifié de « Bouches » n’a rien de féroce, il se répand dans la mer pour mêler ses eaux à celles de la Cagne comme dans un accouplement légendaire.

D’après «Les Histoires de loups en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 18 € : téléphoner au 04 93 24 86 55

Le loup est de retour en France et plus exactement près de nous, dans le Parc du Mercantour et les Alpes du Sud.

Ce « grand méchant loup », cauchemar de nos nuits d’enfant, traînant dans la mémoire collective des générations de « mères-grand » et de « chaperons » dévorés tout cru, revient cette fois sur notre territoire nanti du statut intouchable d’espèce protégée par le Conseil National de la protection de la nature et la Convention de Berne.

Réhabilité et qualifié de « prédateur indispensable à la chaîne alimentaire et aux rétablissements des équilibres naturels », le voici blanchi de tous ses crimes passés et à venir et toléré aux portes de nos villages.

L’homme encore une fois a décidé du destin de la bête  avec sa propre logique.

Pourtant, les souvenirs laissés dans la mémoire de nos aïeux ne sont pas tendres et méritent qu’on s’y arrête.

Les Alpes Maritimes ou « Pays d’Azur », nées de la rencontre des Alpes et de la Provence, offrent un cadre exceptionnel fait de vallées aux forêts sauvages et de villages perchés aux traditions vivaces.

Edmond Rossi, auteur niçois de différents ouvrages sur le passé et mémoire de sa région, présente ici une trentaine de récits recueillis dans les annales de la Provence orientale et du Comté de Nice.

Témoignages authentifiés touchants de vérité, ces textes évoquent les péripéties du loup, dans ce vaste territoire.

Parfois issus d’une tradition orale qui se perpétuait jadis aux veillées, ces contes portaient le plus souvent sur des faits réels, auxquels nos anciens se trouvaient mêlés.

Partons sur la piste mystérieuse de ce grand perturbateur que l’imagination populaire a toujours travesti familièrement de ses propres fantasmes.

A travers les « Histoires de loups au Pays d’Azur » retrouvez les contes de jadis, cette vieille magie des mots qui vous emmène au pays du rêve et de l’insolite.

Pour un temps, laissez-vous emporter vers un passé troublant celui où nos ancêtres vivaient en compagnie du loup avec des rencontres riches d’émotion.

 

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com

 

09:31 Publié dans MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

16/09/2008

PROCESSIONS MACABRES ET SABBATS

La nuit du 2 novembre, se déroule à travers crêtes et vallons, une bien étrange procession. Celle-ci débute à la tombée du jour, en entraînant les morts dans une folle randonnée dans le massif frontalier dominant Isola 2000.

Partant de la vallée transalpine des Thermes de Valdieri, elle débouche derrière la bien nommée Roche de la Poûr (de la peur) à 2972 m. De là, le noir cortège descend  silencieux et impressionnant, dans la combe du Rio Freddo, puis suivant les sommets frontaliers, elle passe de la cime du Malinvern à celle de la Lombarde, bifurquant au-delà du col de la Lombarde pour escalader le col des Morts. La troupe, en rangs serrés descend le vallon du même nom pour poursuivre par celui de l’Aver, dont l’étymologie dérive du latin avernus signifiant l’enfer.

Serpentant sans interruption à travers la transparence livide des névés, les rochers déchiquetés et les éboulis, l’insolite défilé forme une suite continue depuis la Roche de la Peur jusqu’à l’Enfer. Mais d’autres défunts tous aussi déterminés les rejoignent au sinistre col des Morts venant du Prefouns Charnier (ossuaire), après avoir déambulé vers la pointe de la Malecia (la maudite), au-dessus du célèbre sanctuaire de Sainte-Anne-de-Vinadio.

Cette nuit là, chacun se cache chez soi, abandonnant la montagne aux âmes errantes des disparus qui voyagent ainsi, jusqu’à l’aube, dans le brouillard des sommets.

Le charme sera seulement rompu lorsque le chant étouffé d’un coq se répercutera en échos, depuis le fond de la vallée. Alors la rumeur des torrents et le souffle du vent donneront une nouvelle vie à ces sites dantesques où l’homme s’est toujours senti exclu.

Nous ne quitterons pas les montagnes du Parc du Mercantour sans citer les lieux singuliers où s’ébattent d’autres créatures infernales : les sorcières !

Leurs séjours de prédilection s’essaiment tout au long de la chaîne frontalière sans aucun souci des limites territoriales.

On distingue tout d’abord, au fond de la vallée de la haute-Tinée, au-dessus du hameau perdu du Pra, le Mont Bal ; dominant Saint-Martin-Vésubie, le Balaour du Mont Archas et plus haut celui du Balcon du Gelas.

Puis passant dans la fameuse Vallée des Merveilles où les adoratrices de Satan se taillent la part belle avec la Valmasque, on remonte au-delà du col de Sabion, pour atteindre la cime de Balmasqua. Enfin, plus à l’ouest dans le massif du Marguareïs, surmontant La Brigue, signalons la cime du Plan Balaour.

Là-haut, sur ces terres maudites, les nuits de pleine lune, parmi les cris, les ricanements et les danses, les sorcières célèbrent leurs messes noires à la gloire de leur maître le Prince des Ténèbres. Chevauchant leurs balais, ces créatures diaboliques complotent et se livrent à d’abominables orgies jusqu’aux premières lueurs de l’aube.

Elles disparaîtront là encore, lorsque retentira l’écho du premier chant du coq.

Bien que toujours hostile sous les chauds rayons du soleil, la montagne retrouvera pour un temps, sa sérénité.

Rassuré sur ses propres fantasmes, l’homme s’aventurera alors dans ces solitudes alpestres.

D’après « Les Aventures du Diable en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 18 € : téléphoner au 04 93 24 86 55

Où mieux rencontrer le Diable que dans les Alpes Maritimes, sur ces terres chargées de contrastes où s’opposent mer et montagne, au carrefour de la Provence et de l’Italie ?

Ici, le Diable est aussi à l’aise sur la Côte d’Azur où s’étalent d’outrageantes richesses que  vers l’intérieur où se cachent une humilité austère.

Puits du Diable, Château du Diable, Cime du Diable, longue est la liste des sites, marqués par la forte empreinte de celui qualifié par Bernanos de « Singe de Dieu ».

De Nice, à la Vallée des Merveilles, devenue son « domaine réservé », le Diable hante les villages, plastronne sur les murs des chapelles et persiste à enflammer l’imaginaire de ses habitants.

Il fallait raconter l’extraordinaire aventure du Diable dans les Alpes Maritimes. Grâce à Edmond Rossi, auteur niçois de plusieurs ouvrages sur l’histoire et la mémoire de son pays, cette lacune est aujourd’hui comblée.

Laissons-nous entraîner, à travers les siècles, sur la piste attrayante et mouvementée, de l’éternel et fascinant tourmenteur du cœur et de l’âme.

 

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

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09:05 Publié dans MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

16/07/2008

UTELLE: LA RONDE INFERNALE !

Arthur Garnier, parti la veille de Nice avec ses quatre mulets chargés de victuailles avait rejoint le soir Utelle, par Levens, après dix heures de marche soutenue.

Animé de la même ardeur, il avait quitté Utelle au petit matin, avec comme future étape Saint Sauveur qu’il atteindrait le soir, au terme de dix nouvelles heures de marche.

Les mulets transportaient sur leurs bâts quelques sacs de sels, du poisson séché et d’autres marchandises recherchées dans la montagne comme du sucre et du café.

En ce 25 septembre 1857, le temps clair encourageait Arthur, bien que seul sur son chemin. En effet, à l’auberge relais de la Croix Blanche il n’avait rencontré aucun compagnon de route possible et cela, bien que la proximité des foires de la Saint Michel soit prétexte à attirer les  marchands vers le Haut-Pays.

Dans la montée du col, placé en serre file avec une baguette de genêt, l’homme stimulait les bêtes du geste et de la voix. Les mulets cédaient parfois à la tentation de brouter au passage une touffe de thym, plaisir refusé par leur maître peu enclin à musarder. N’avaient-t-ils pas eu leur lot de picotin à la Croix Blanche où le valet d’écurie s’acquittait toujours avec zèle du soin des bêtes.

Après avoir très vite franchi le col d’Utelle, le chemin plongeait sur le versant sauvage du vallon des Carbonnières plus de cinq cent mètres plus bas, pour aboutir à la chapelle Sainte Elisabeth, avant de grimper à nouveau jusqu’à la Tour.

Placé dans l’ombre froide de l’ubac, sous de sinistres barres de roches grises, ce quartier conservait une mauvaise réputation, après avoir été dans un passé récent le théâtre de fréquentes attaques de Barbets, détrousseurs de voyageurs.

De plus, la proximité des bois où s’abritaient les loups favorisait de toutes aussi dangereuses rencontres.

 allait sans dire que les marcheurs empruntant ce parcours accéléraient le pas, pour  s'écarter d’une menace évidente, entretenue et amplifiée par les témoignages des victimes d’attaques répétées.

Arthur, habitué de cette course, faisait confiance à Sainte Elisabeth, patronne du lieu, pour le protéger lui et son équipage, il ne manquait jamais de la remercier, plus bas, à la chapelle qui lui était dédiée.

parvenu à peu de distance du hameau abandonné des Carbonnières, Arthur dût insister de la voix et du geste pour faire avancer ses bêtes. Pressentant quelque chose d’anormal, le muletier, mis en éveil, observa attentivement les alentours.

Quelle ne fut pas sa surprise de voir apparaître sortant du bois, sur la rive opposée du vallon, une horde de loups bondissant à toute hâte, pour venir à sa rencontre avec l’évident désir de l’attaquer lui et sa cavalerie !

Arthur réagit avec célérité pour forcer ses bêtes à reprendre la descente, afin de rejoindre au plus vite les proches granges du hameau de Carbonnières. Après une cavalcade éperdue, les mulets effrayés furent promptement poussées dans une étable. L’homme eut tout juste le temps de barricader la porte, que déjà la meute hurlante cernait les abords.

son équipage étant à l’abri, Arthur grimpa à l’étage supérieur pour mieux évaluer la menace et observer ses assaillants. Dissimulé derrière le volet de la fenêtre, il put observer une dizaine de loups de tailles différentes, conduits par un grand mâle.

Un rien désappointé, le groupe renifla la trace des mulets, puis conscients de leur présence dans l’étable gratta à la porte en hurlant pour tenter d’y pénétrer. Effrayées, les bêtes de somme hennissaient en sautant pour se dégager de la longe qui les immobilisait. Leurs cris de terreur excitaient davantage les loups, lesquels, impuissants et fous de colère, entreprirent alors de tourner à la queue leu leu autour de la bâtisse, pour rechercher à tout prix un accès.

Le rythme effréné de leur ronde infernale s’accentua très vite, souligné par de féroces aboiements de colère. Le carrousel échevelé entraînait l’ensemble de la meute, avec pour certains quelques hésitations dues à des marques indéniables de faiblesse.

Les retardataires, à bout de force, tentaient de s’écarter de l’hallucinante sarabande, mais bousculés piétinés et mordus ils furent bientôt assaillis par leurs semblables, avant d’être dévorés faute de mieux.

Arthur assistait médusé au carnage,  mesurant le péril auquel il venait d’échapper.

La rage meurtrière qui animait les plus vigoureux paraissait ne plus devoir s’apaiser.

Ni les plaintes, ni les signes de soumission ne semblaient trouver grâce auprès des agresseurs. Poussés par la faim, attisés par la vue et l’odeur du sang, les plus forts égorgeaient les plus faibles. Cette horrible tuerie ponctuée de grognements se poursuivit des heures durant jusqu’à ce que rassasiés les fauves décident de quitter les lieux, en abandonnant les restes de leurs malheureux congénères.

La nuit était fort avancée et seule la lune éclairait de sa lumière blafarde le théâtre de cette abominable tragédie lorsque s’acheva enfin le massacre.

Prudent, Arthur préféra attendre le lever du jour pour reprendre le chemin de La Tour en compagnie de ses mulets. Passant devant la chapelle Sainte Elisabeth, il s’arrêta longuement pour prier et remercier avec une ferveur inaccoutumée, celle à qui il lui paraissait devoir son salut.

D’après «Les Histoires de loups en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 18 € : téléphoner au 04 93 24 86 55

Le loup est de retour en France et plus exactement près de nous, dans le Parc du Mercantour et les Alpes du Sud.

Ce « grand méchant loup », cauchemar de nos nuits d’enfant, traînant dans la mémoire collective des générations de « mères-grand » et de « chaperons » dévorés tout cru, revient cette fois sur notre territoire nanti du statut intouchable d’espèce protégée par le Conseil National de la protection de la nature et la Convention de Berne.

Réhabilité et qualifié de « prédateur indispensable à la chaîne alimentaire et aux rétablissements des équilibres naturels », le voici blanchi de tous ses crimes passés et à venir et toléré aux portes de nos villages.

L’homme encore une fois a décidé du destin de la bête  avec sa propre logique.

Pourtant, les souvenirs laissés dans la mémoire de nos aïeux ne sont pas tendres et méritent qu’on s’y arrête.

Les Alpes Maritimes ou « Pays d’Azur », nées de la rencontre des Alpes et de la Provence, offrent un cadre exceptionnel fait de vallées aux forêts sauvages et de villages perchés aux traditions vivaces.

Edmond Rossi, auteur niçois de différents ouvrages sur le passé et mémoire de sa région, présente ici une trentaine de récits recueillis dans les annales de la Provence orientale et du Comté de Nice.

Témoignages authentifiés touchants de vérité, ces textes évoquent les péripéties du loup, dans ce vaste territoire.

Parfois issus d’une tradition orale qui se perpétuait jadis aux veillées, ces contes portaient le plus souvent sur des faits réels, auxquels nos anciens se trouvaient mêlés.

Partons sur la piste mystérieuse de ce grand perturbateur que l’imagination populaire a toujours travesti familièrement de ses propres fantasmes.

A travers les « Histoires de loups au Pays d’Azur » retrouvez les contes de jadis, cette vieille magie des mots qui vous emmène au pays du rêve et de l’insolite.

Pour un temps, laissez-vous emporter vers un passé troublant celui où nos ancêtres vivaient en compagnie du loup avec des rencontres riches d’émotion.

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