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11/02/2009

L'ESCARÈNE : LA NYMPHOMANE DES BOIS

LE BERGER DE FONTANALBE.jpg

L’Escarène, bourg situé au Nord de Nice, au pied du col de Braus, possède une très belle forêt, accessible à 1100m, sur les crêtes dominant la vallée du Paillon : la forêt du Farghet. Les chroniques rappellent une histoire troublante à propos d’une maison isolée au fond des bois qui abrita une femme insatiable, véritable dévoreuse d’amour ! Ni ogre, ni vampire, mais tout simplement une passionnée qui aimait violemment son prochain.

Pour mieux séduire et se faire aimer, elle s’exhibait dans le plus simple appareil devant l’homme, éternellement faible. Gare au berger, au bûcheron ou au promeneur de passage ! Dans ses crises de passion, elle enserrait le malheureux mâle dans ses bras puissants et ne consentait à le délivrer qu’à la fin du rut, jusqu’à complète satisfaction.

Les récits des victimes de la farouche créature, entraînèrent des curieux, pas toujours involontairement égarés dans la forêt du Farghet.

Une de ces dernières conquêtes possédait tous les traits et, parait-il, tous les attributs virils. Il ne put trop longtemps résister aux entreprises trop affectueuses de l’insatiable séductrice. Aussi, quand la diablesse réalisa le déclin naturel des performances de son partenaire, combien de ruses ne déploya-t-elle pas pour raviver cet utile et puissant compagnon qui pendant plusieurs semaines avait fait les délices de ses nuits enfiévrées !

Rien n’y fit, car le pauvre bougre était pour ainsi dire à bout de sève et de souffle, impuissant, absolument « vidé » et hors d’usage.

Brisé, il supporta en patient, sans éprouver aucun plaisir la fin de l’étreinte excessive et s’enfuit épuisé vers les étables pour s’y enfermer avec d’autres bêtes plus calmes, qui semblaient le protéger.

Le lendemain, il s’en fut raconter à Monsieur le Maire du petit bourg proche ses peines inouïes, les abus sexuels et les mésaventures conjugales qui en découlaient.

On ne connaît pas les mesures prises par l’autorité après que la brigade de gendarmerie fut avisée de ces viols réitérés. Mais le fait est que la plainte est authentique. Devenu plus paisible de nos jours, les parages de la Forêt du Farghet n’exposent plus les promeneurs à ces hasardeuses et dangereuses rencontres, à moins que quelque fantôme ne hante encore les bois dans la quête de nouvelles victimes !

 

D’après « Les Légendes et Chroniques insolites des Alpes Maritimes » (Equinoxe-éditions Saint Rémy de Provence), pour commander cet ouvrage dédicacé de 23 € : téléphoner au 04 93 24 86 55.

Avec les "Légendes et Chroniques insolites des Alpes Maritimes", Edmond Rossi, auteur niçois de plusieurs ouvrages sur le passé de son pays, nous offre un recueil d'une centaine de relations confondant la vérité historique et l'imaginaire de la légende.

Pour tous ceux qui désirent connaître non plus une Côte d'Azur artificielle mais une terre de culture et de mémoire, ce recueil constitue une promenade originale puisée aux meilleures sources.

Les Alpes Maritimes possèdent un particularisme né d'un isolement géographique, terre de contraste. Elles offrent une tradition enracinée dans un passé fertile en anecdotes souvent ignorées.

Merveilleux voyage que ces récits qui vont des légendes des origines aux chroniques d'un millénaire de défis naturels, se poursuivant vers des villages du bout du monde pour y traverser un passé où se croisent les silhouettes d'illustres personnages et l'ombre inquiétante des sorcières.

Laissons nous conduire dans les coulisses secrètes de ce théâtre factice qu'est la Côte, vers l'intérieur de ce pays d'Azur, à quelques pas du littoral, pour en découvrir et en pénétrer l'âme.

 

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com

 

 

 

17:10 Publié dans MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

04/02/2009

LA GAUDE: UNE COUR ASSIDUE

81 LE LOUP VISITEUR page 81.jpg

Ceci est la version véridique du petit chaperon rouge à la mode gaudoise. Les faits remontent à l’hiver 1889 et font encore frissonner de terreur ceux qui me les ont rapportés.

En ce temps là, La Gaude, s’entourait de bois touffus où s’abritaient les loups, cette menace obligeait ses habitants à la plus extrême prudence, tout particulièrement l’hiver. Affamés ces prédateurs pleins d’audace n’hésitaient plus alors, à s’avancer jusque dans les rues du village. 

Pauline, l’aînée des Simond, mignonne blondinette aux yeux clairs, devait en dépit de ses  dix ans, s’acquitter de bon nombre de tâches ménagères pour soulager sa mère qui avait fort à faire avec ses cinq frères et sœurs. Trois fois par jour, matin, midi et soir, c’est elle qui assurait la corvée d’eau potable en descendant de leur maison située au quartier des Paganes jusqu’à la Mairie, pour remplir ses deux cruches.

C’est ainsi qu’un sombre soir de janvier où il gelait à pierre fendre, alors qu’elle ployait sous la charge en remontant le chemin raide conduisant à la demeure familiale, elle se sentit suivie et observée. Bien qu’accélérant le pas, elle fut très  vite rattrapée par un énorme loup, aussi haut qu’elle. Sans se démonter, Pauline interpella l’animal : « Oh ! le loup, écarte-toi, Tu ne vas pas me manger moi si petite et si maigrelette ! ». Surpris par son aplomb, l’animal s’arrêta, hésita, puis recula. Ensuite, timidement, il n’en prolongea pas moins son inquiétante filature jusqu’au domicile de l’enfant.

Rentrée chez elle, Pauline repoussa vivement la porte, toute essoufflée par la course,  racontant d’un trait sa rencontre et les curieuses manières du gros loup, pourtant  réputé comme un amateur de chaire fraîche ! Le père décrochait déjà le fusil, lorsque des grattements effleurèrent la porte avec une curieuse insistance. Pas de doute, le gros loup poursuivait sans vergogne la petite Pauline de ses assiduités. La porte une fois ouverte, seuls la nuit et le vent glacial porteur d’un lointain hurlement de détresse répondirent aux interrogations de la petite famille.

Les nuits qui suivirent le gros loup poursuivit sa cour, grattant désespérément à la porte de Pauline, pour s’enfuir dès que le père sortait en le menaçant de son fusil.

Lassé par le manége, ce dernier planta des clous sur la porte ce qui mit un terme à ces agissements, dignes de ceux d’un amoureux impénitent.

Aujourd’hui encore, la porte des Simond présente les scarifications et les clous, traces du conflit suscité par l’étrange passion  d’une bête pour une innocente fillette.

D’après «Les Histoires de loups en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 18 € : téléphoner au 04 93 24 86 55

Le loup est de retour en France et plus exactement près de nous, dans le Parc du Mercantour et les Alpes du Sud.

Ce « grand méchant loup », cauchemar de nos nuits d’enfant, traînant dans la mémoire collective des générations de « mères-grand » et de « chaperons » dévorés tout cru, revient cette fois sur notre territoire nanti du statut intouchable d’espèce protégée par le Conseil National de la protection de la nature et la Convention de Berne.

Réhabilité et qualifié de « prédateur indispensable à la chaîne alimentaire et aux rétablissements des équilibres naturels », le voici blanchi de tous ses crimes passés et à venir et toléré aux portes de nos villages.

L’homme encore une fois a décidé du destin de la bête  avec sa propre logique.

Pourtant, les souvenirs laissés dans la mémoire de nos aïeux ne sont pas tendres et méritent qu’on s’y arrête.

Les Alpes Maritimes ou « Pays d’Azur », nées de la rencontre des Alpes et de la Provence, offrent un cadre exceptionnel fait de vallées aux forêts sauvages et de villages perchés aux traditions vivaces.

Edmond Rossi, auteur niçois de différents ouvrages sur le passé et mémoire de sa région, présente ici une trentaine de récits recueillis dans les annales de la Provence orientale et du Comté de Nice.

Témoignages authentifiés touchants de vérité, ces textes évoquent les péripéties du loup, dans ce vaste territoire.

Parfois issus d’une tradition orale qui se perpétuait jadis aux veillées, ces contes portaient le plus souvent sur des faits réels, auxquels nos anciens se trouvaient mêlés.

Partons sur la piste mystérieuse de ce grand perturbateur que l’imagination populaire a toujours travesti familièrement de ses propres fantasmes.

A travers les « Histoires de loups au Pays d’Azur » retrouvez les contes de jadis, cette vieille magie des mots qui vous emmène au pays du rêve et de l’insolite.

Pour un temps, laissez-vous emporter vers un passé troublant celui où nos ancêtres vivaient en compagnie du loup avec des rencontres riches d’émotion.

 

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16:43 Publié dans MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

07/01/2009

BREIL SUR ROYA:LA VENGEANCE DE LA MASCA (SORCIÈRE)

LA DAME BLANCHE.jpg

Il était notoire que la brûlante Malvina, une rousse au teint de lait, connue comme une redoutable sorcière et crainte pour cela par les gens de la vallée de la Roya, fréquentait sans vergogne son promis : Hippolyte, un solide gaillard de Breil.

C’est ainsi que chaque soir, sa journée finie, l’homme en soupirant assidu, quittait le village pour grimper vers le vallon de la Maglia rejoindre une maisonnette nichée dans les oliviers, où demeurait sa fiancée, la masca à la chevelure de feu.

Hippolyte s’attablait alors pour souper avec la belle hôtesse qu’il trouvait chaque fois un peu plus fascinante dans la douce lumière de la lampe à huile. Le menu variait à chaque occasion et avait de quoi faire rêver plus d’un gourmet ! Tagliarini faits main, boursottes farcies de poireaux frits, d’épinards, de blettes, de riz, d’anchois et de fromage ! Le tout dans une pâte croustillante, tourtes de courgette, de blettes ou de tomates, suggeri et pour finir la crechente, délicate brioche parfumée d’anis et de raisins secs. Captivé comme un papillon par les reflets exaltant les mets et l’objet de ses désirs, le fiancé avait tenté d’approcher davantage Malvina, sous le prétexte de ne pouvoir résister aux effets aphrodisiaques de sa cuisine, mais chaque fois en vain.

Econduit, le malheureux garçon commençait à connaître par cœur l’implacable réplique repoussant ses élans amoureux : « Non, pas ce soir, tu me plais bien, sois patient, mais j’ai affaire avec des gens d’importance qui n’accepteraient pas ta présence ». Rien n’y faisait, ni la courtoisie ni l’insistance brutale. Rejeté, Hippolyte reprenait alors, tête basse, le sinueux sentier descendant dans la nuit vers les lumières scintillantes du village.

Parfois, il en vint même à regretter les plats moins élaborés des modestes cordons bleus de Breil, mais presque aussitôt l’image envoûtante des yeux verts de sa diabolique amie écartait ces rêveries d’une vie plus sage.

Un soir, décidant d’en avoir le cœur net, il se dissimula dans un taillis proche de la maison de la belle. Les heures passaient, au douzième coup de minuit, Malvina sortit vêtue d’une étincelante robe blanche à longue traîne, la chevelure gonflée encadrant son visage outrageusement maquillé, puis saisissant un balai de genêt, posé près de la porte, elle l’enfourcha comme une véritable sorcière et glissa plus qu’elle ne marcha en direction du pont d’Ambo. « Fille du diable » murmura son fiancé, puis aussi agile qu’un chamois, il s’élança sautant les restanques à grandes enjambées pour suivre l’aérienne Malvina et parvenir enfin aux abords d’une vaste prairie.

Là, la masca retrouvait une assemblée de spectres échevelés, visages décharnés, vêtus d’habits d’un autre temps.

Hommes et femmes se lançaient alors dans une folle farandole rythmée par le son des fifres et tambours d’un orchestre invisible. Entraînée dans cette danse effrénée, où les corps s’entremêlaient sans retenue, Malvina s’offrait tour à tour à chacun, se laissant enlacer dans ce tumultueux sabbat. Cris, rires accompagnaient les tourbillons des danseurs emportés par les échos interminables d’une musique répétitive.

Ne pouvant supporter davantage le spectacle de son infortune, fou de douleur, Hippolyte hurle alors sa peine et sa rage attirant l’attention de sa belle. Surexcitée, Malvina se jette alors sur lui prunelles révulsées, ongles en avant semblable à une panthère en furie : « Tu as voulu m’espionner, puisqu’il en est ainsi je romps mes fiançailles, disparais à jamais de ma vie. » Puis s’adressant à ses compagnons de sabbat : « Occupez-vous de lui, débarrassez-moi de ce pénible fardeau ! »

En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, le malheureux Hippolyte est soulevé du sol et tel un fétu de paille emporté dans les airs par une puissante tornade jusqu’au lit de la Roya voisine, pour être plongé dans l’eau glacée de la rivière.

Suffoqué, manquant se noyer, entraîné par le courant, se débattant, il réussit à s’accrocher à la branche d’un arbre surplombant la rive. Il parvint ainsi à sortir de ce mauvais pas et à rejoindre le village endormi.

Dès le lendemain, emportant ses quelques affaires dans une toile nouée aux quatre coins, il chargeait son âne et quittait Breil, sans mot dire, par la porte de Gênes, bien décidé à fuir les maléfices de celle qu’il avait pourtant choisie pour sa beauté et ses qualités ménagères.

A Breil chacun s’étonna de la promptitude du départ de cet enfant du pays, quelqu’un affirma qu’il avait sans doute trouvé une bonne place sur la côte, comme bien d’autres avant lui. Le silence de Malvina sur ce départ précipité n’intrigua pas outre mesure, on avait ici pris depuis longtemps le parti d’accepter les comportements étranges de celle qu’on appelait la masca.

Il fallut une nouvelle affaire plus sérieuse pour que s’affiche publiquement la nature vindicative et destructrice de l’inquiétante sorcière de la Maglia. Nous avons vu que la passion de la danse entraînait Malvina à passer des nuits blanches, aussi ne pouvait elle manquer le bal du festin de Breil. C’est au cœur de l’été, sur la place du village qu’en cette occasion filles et garçons se retrouvaient pour y danser le quadrille. Malvina, tenue à l’écart de la première figure, trouva place prise pour la seconde par la mignonne Flora qui prétendait poursuivre jusqu’à la cinquième. « Tu me paieras cet affront petite dévergondée » lui lança la perfide sorcière. Mais, désinvolte, Flora lui répondit par un sourire en la renvoyant à son danseur attitré, qui dans les bals précédents n’était autre que le bel Hippolyte. Ce qui poussa l’exaspération de la Rousse à son comble.

« Danse Flora lui répliqua-t-elle d’une voix acide, danse sur la pointe des pieds, saute, lève les jambes et ton joli jupon, danse, danse Flora ! »

A cette invective, les amis de Flora tremblèrent redoutant quelque sort funeste pour cette jeune écervelée. Flora écartant toute menace de cette nature, ne prit même pas la peine de conjurer ces possibles maléfices en se rendant le jour suivant à la chapelle Saint Antoine pour y réciter quelques oraisons.

Au lieu de ça, conduite par on ne sait quelle idée saugrenue, Flora s’engagea d’un pas alerte sur le chemin du Casté, sans s’attarder aux Crottes, pour grimper jusqu’aux ruines de Crivella. Parvenue là, elle monta au sommet de la tour, attirée en ce lieu singulier comme un oiseau fasciné par un serpent. Puis, entraînée par une musique guillerette apportée par la brise, elle se mit à danser sautillante et gaie au rythme du fifre et du tambourin. Les paroles de Malvina résonnaient dans sa tête : « Danse, danse Flora, danse sur la pointe des pieds, lève les jambes, soulève ton jupon, danse, danse. »

Sans aucune appréhension, la malheureuse jeune fille se laissa aller à des entrechats vertigineux sur le bord d’un créneau, avant de s’élancer soudain dans le vide sous le regard effrayé des gens de Breil. Le sortilège était évident, c’en était trop ! Malvina après avoir envoûté la pauvre Flora l’avait poussée vers la mort par la seule force de son pouvoir diabolique.

Malgré les recherches, on ne parvint pas à retrouver le corps de Flora. On fouilla vainement les broussailles au pied de la falaise pour n’y découvrir que son fichu d’indienne et l’un de ses escarpins vernis. Après cet événement tragique, on s’interrogea sur la disparition d’Hippolyte qui ne pouvait être, elle aussi, que le fait de quelque maléfice de la masca de la Maglia. Il fallait qu’elle s’explique. Capturée et chargée sur une charrette tirée par un âne rouge, solidement ligotée, elle apparut les cheveux sur le visage, le bonnet et le corsage à l’envers traversant le village sous les lazzi et les cris de haine : « A mort ! Noyons la ! A la potence ! »

Le regard de la sorcière affrontait celui des pieuses femmes qui se signaient. Grimaçante, elle tira la langue à d’autres qui se sentaient alors défaillir. Le cortège aboutit au parvis de l’église où un tribunal interrogea la sorcière. Celle-ci dégagea habilement sa responsabilité dans la disparition d’Hippolyte, comme dans la chute de Flora, pour cette dernière comment aurait-elle pu intervenir alors qu’elle était chez elle occupée à trier ses olives ?

Quant à Hippolyte, il était parti de son plein gré, libre de ses mouvements. Comment pouvait-elle être victime d’accusations gratuites, sans l’ombre d’une preuve ? Quant au corps de Flora, il fallait insister, les taillis et les fourrés devaient conserver ses restes, elle n’avait pu disparaître, ce n’était pas son affaire.

Sa conviction l’emporta sur la passion de la foule et après délibération, le verdict tomba et on ne retint que le trouble à l’ordre public passible du bannissement. Elle serait désormais assigné à résidence dans le village voisin d’Airole au Sud de Breil. La sentence était immédiatement exécutoire.

Malvina, suivie par les gens de Breil soucieux de s’assurer de son départ en exil, quitta le village en se permettant encore un ultime pied de nez accompagné de ces quelques paroles rageuses : « Sachez que je reviendrai vous voir avant mon trépas, maudites gens ! On se reverra ... »

Un demi-siècle plus tard, au crépuscule d’une belle journée d’hiver, pénétrait dans Breil par cette même porte de Gênes une louve enragée l’œil saignant et la gueule baveuse. Un homme d’arme chargé de surveiller l’accès du bourg tenta de s’opposer à son passage avant d’être assailli et égorgé.

Après cette attaque, la bête épargna les habitants fuyant devant sa menace, elle franchit la Roya pour poursuivre sa quête vers une campagne où un berger regroupait ses moutons.

Le troupeau apeuré se serra autour de l’homme, mais la louve ne se souciait guère du bétail en voulant avant tout au berger.

Le maître du troupeau n’était autre qu’Hippolyte. Devenu un vieillard chenu mais robuste, il s’était retiré au pays après avoir couru le monde. Comprenant les intentions du féroce animal, il l’attendit de pied ferme. Lorsque la louve bondit sur lui la gueule ouverte, il lui enfonça de toutes ses forces entre les mâchoires sa houlette ferrée jusqu’aux entrailles.

Lorsqu’il reconnut soudain dans les prunelles révulsées les reflets verts qui l’avaient fasciné jadis, son bras ne céda pas. Cette impression fugitive ramenait le vieil Hyppolite à ses années de jeunesse. Il murmura simplement : « Il était écrit que l’un de nous deux périrait par l’autre ! »

Un jour plus tard, un muletier d’Airole apprit aux habitants de Breil le décès de leur compatriote exilée.

 

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18:31 Publié dans MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire