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25/05/2012

VILLENEUVES D'ENTRAUNES: SON PASSÉ, SON HISTOIRE, SES LÉGENDES

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« HISTOIRES ET LÉGENDES DE VILLENEUVE D'ENTRAUNES »

D’EDMOND ROSSI

Niché sur les bords du Var, aux limites nord-ouest du département des Alpes-Maritimes, à une centaine de kilomètres de Nice, Villeneuve d’Entraunes, à 900m d’altitude, compte une centaine d’habitants dont trente résidents permanents.
En 1754, l’enquêteur du Roi de Piémont-Sardaigne, Gaspard Joanini, témoigne de son isolement en indiquant : “ Ce lieu se trouve en plaine, au milieu des montagnes, distant de la présente ville (Nice) de deux jours et demi en passant dans le domaine de la France par Cros (Ascros) ou Entrevaux et passant dans les Etats de sa Majesté (le Duc de Savoie) quatre jours, ce qui toutefois n’est pas possible en hiver. Il est composé de 46 feux et 200 personnes. Il touche aux territoires de St. Martin, Sauze, Châteauneuf et à celui de Guillaumes en France ”.
Le Var tranche le val alpin, opposant les ubacs boisés des montagnes d’Enaux aux adrets marneux où s’étale le village dominé par les écarts du Claous et de Bantes, le tout écrasé par la masse grise des falaises du Rocher de la Maïre à l’origine du terrible torrent du Bourdous. L’Histoire du village n’est qu’une longue lutte contre les débordements dévastateurs du Bourdous. Sorte d’oued le plus souvent asséché, capable d’enfler en quelques minutes à la suite d’un orage, pour se transformer alors en une coulée de boue noire précédée d’un souffle qui descend en grondant à la vitesse d’un cheval au galop, balayant tout sur son passage.
Ouvrage illustré, disponible en CD en contactant: edmondrossi€wanadoo.fr
prix 15€

Consulter, du même auteur, le livre « Du Mistral sur le Mercantour » inspiré par le passé de Villeneuve d’Entraunes.

Les dieux se sont réfugiés au cœur des régions montagneuses, prédisposant les sommets à devenir de fascinants hauts lieux de l’étrange. A l’extrémité des Alpes du Sud, le « Parc naturel du Mercantour » confirme avec éclat cette vocation établie depuis les origines de l’humanité.

Accrochés à la caillasse au-dessus de gorges étroites et impénétrables, les villages perchés, maintenus à l’écart des bouleversements, ont su résister au temps et garder d’admirables témoignages du passé. Parmi ceux-ci, des récits originaux véhiculés jusqu’à nous par les bourrasques du mistral comme autant de feuilles d’automne. Edmond Rossi, originaire du val d’Entraunes, nous invite à pénétrer l’âme de ces vallées, grâce à la découverte de documents manuscrits inédits, retrouvés dans un grenier du village de Villeneuve.

Si les « récits d’antan » présentent des histoires colportées aux veillées depuis la nuit des temps, les « faits divers » reflètent une réalité contemporaine d’une troublante vérité. Edmond Rossi est depuis son plus jeune âge passionné par l’histoire de sa région. Il signe ici son troisième ouvrage aux Editions Alan Sutton.

«Du Mistral sur le Mercantour» (Editions Sutton),

En vente sur Internet http://www.editions-sutton.com

ou dédicacé, au prix de 21 euros, plus frais d’envoi, en contactant edmondrossi@wanadoo.fr

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com 

18/05/2012

LA FIN TRAGIQUE DE BEATRICE DE TENDE

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Voici plus de cinq siècles, le 14 Septembre 1418, roulait dans la cour du château de Binasco, la tête tranchée de Béatrice de Tende, duchesse de Milan.

Cette fin tragique émut non seulement les chroniqueurs contemporains, mais au fil du temps nombre d’écrivains, poètes, artistes et musiciens qui battirent une légende autour du drame vécu par cette silhouette sortie du château de Tende.

L’ambiance vénéneuse où vécut Béatrice de Tende est constituée d’intrigues, de poignards et de potions propres à la noblesse italienne de ce début du XVème siècle. Courtisans hypocrites, politiciens cyniques hantent ce décor de théâtre où elle sera glorifiée avant d’être happée, torturée et suppliciée jusqu’à la mort.

Elevée comme ses cinq frères dans le sombre château des Lascaris de Tende, Béatrice porterait son second nom de baptême, le premier étant celui de Catherine, elle l’aurait adopté en 1403 à l’occasion de son mariage avec le capitaine Facino Cane, âgé de trente ans, zélé défenseur du duché de Milan.

Ayant grandi dans le bruit des armes au château de Tende où s’imposait la dure réalité et une politique de fer, Béatrice n’est pas un personnage romantique, sensible au charme des ménestrels, mais une femme froide, déterminée qui suit activement les changements pour parvenir à favoriser sa fortune.

Facino Cane et Béatrice de Tende parcourent toute l’Italie du Nord à la tête d’une compagnie de mercenaires de plus de 10000 hommes, au nom de Giovanni Maria Visconti, duc de Milan. Ils s’emparent de Plaisance, Novare et Alexandrie, imposant par la force le pouvoir de leur maître. Giovanni Maria, au caractère ombrageux, en proie au délire de la persécution, se laisse entraîner par Facino qui lui suggère diaboliquement des actions propres à assouvir ses perfides vengeances. Facino et Béatrice deviennent ainsi les maîtres absolus de Milan.

Giovanni Maria, décrit comme brutal et sadique par les chroniqueurs de l’époque, élevant des chiens destinés à déchirer les prisonniers, qu’il se plaît à torturer lui-même, hante avec délice les geôles où il fréquente le bourreau, devenu son meilleur ami.

Facino pourrait alors s’emparer de la couronne ducale, mais il ne possède pas l’intuition politique de la situation.

Giovanni Maria flaire la menace et tente d’isoler et capturer son encombrant capitaine, mais la manœuvre échoue. Ce condottiere, qualifié à l’époque d’épée la plus forte d’Italie, à la tête d’une compagnie formée d’hommes célèbres, à l’apparition desquels tremblent les princes et les cités, revient à Milan un mois plus tard pour être accueilli avec enthousiasme.

Facino et Béatrice gouvernent alors en véritables chefs. Deux ans après, le 16 Mai 1412, Giovanni Maria tombe à 24 ans, poignardé à la suite d’un complot ourdi par l’évêque de Plaisance, Facino le suit, victime à cinquante deux ans d’une violente attaque de goutte au siège de Brescia. Béatrice, âgée d’environ 40 ans se retrouve seule et sans enfant.

Après la disparition de Giovanni Maria et Facino Cane, le duché plonge dans l’anarchie. Parmi les révoltes et les massacres, se dessine la silhouette morale et politique de Filippo Maria Visconti, jeune frère de Giovanni Maria, âgé de vingt ans.

Le nouveau duc intrigue avec Venise, l’empereur Sigismond et ses divers adversaires, mais ses qualités de diplomate sont altérées par une hantise maladive des conjurations et complots supposés. Superstitieux, d’humeur changeante, pervers sexuel insensible, tel apparaît alors le jeune Filippo Maria sur la scène du duché de Milan. Sa conquête du pouvoir ne peut s’opérer sans l’appui d’une force militaire. De son côté, Béatrice, enfermée dans les murs de Milan, entourée encore d’une partie importante de la compagnie de mercenaires qui ne prêtaient serment qu’à la comtesse et à Facino Cane, possède d’immenses richesses accumulées dans ses coffres. Pourtant, elle se sent seule et isolée, lorsque s’offre une opportunité insoupçonnée : la demande en mariage du jeune duc Filippo Maria Visconti.

D’un côté, nous trouvons une femme mûre, avec un lourd passé et un avenir incertain, à la tête d’une fortune de 400.000 ducats d’or et une des plus puissantes compagnies, des fiefs importants (Turin, Novare, les terres du lac Majeur), et de l’autre un jeune homme imberbe, ambitieux, pauvre mais riche de titres et d’espoirs.

Béatrice part en campagne et chevauche d’Alexandrie à la Lombardie, matant les rebelles, son équipée s’achève par une entrée triomphale à Milan au côté de Filippo Maria, le 16 Juin 1412.

Puis le duc s’enferme à nouveau dans ses obsessions de ténébreux complots, alors que Béatrice voit se dissiper le halo de fidélité de la compagnie, pour se retrouver progressivement isolée et délaissée.

Filippo Maria, souvent accompagné d’Agnès du Maine, une des plus belles dames de l’époque, ennuyé par les prétentions et conseils d’une femme qui pourrait être sa mère, cherche un prétexte pour se débarrasser de l’encombrante duchesse.

L’atmosphère qui entoure la révocation d’un absurde mariage d’intérêt, le mépris de Filippo Maria, sa stérilité sexuelle entraîne Béatrice à quarante cinq ans vers un timide compatriote, Michele Orombello, venu de Vintimille.

Très vite, la calomnie va se répandre sur cet amour plus ou moins réel, certains ministres humiliés par la duchesse trouvèrent là une revanche et les courtisans des Visconti s’empressèrent de répandre le poison.

Devant ces accusations, Béatrice proteste et se défend, on insinue alors qu’elle se prépare à empoisonner le duc au profit de l’Ambassadeur de France.

Le duc baisse le masque à l’aube du 23 Août 1418, en faisant arrêter à Milan Béatrice et deux de ses demoiselles d’honneur, ainsi qu’Orombello qui, sûr de son innocence, n’a pas voulu s’enfuir. Les prisonniers sont conduits sous bonne escorte au château de Binasco.

L’une des raisons invoquée pour justifier cet acte, résiderait dans la vengeance tardive de Filippo Maria contre celle qui, un jour, l’avait réduit à la misère, dépouillé de son duché et menacé dans son existence.

Commence alors la farce tragique du procès. Sur les cinq juges, trois siégeront le visage couvert, par une cagoule noire ! Le procès débute sur des confrontations où l’innocence des propos est déviée avec art vers des significations cachées sur lesquelles on bâtit une série d’accusations sournoises. Pour faire bonne mesure, il faut des aveux que l’on ne tardera pas à obtenir.

Les deux jeunes et belles demoiselles, dénudées, accrochées à des poulies grinçantes, soumises à des tractions de cordes, fouettées jusqu’au sang, désarticulées comme des poupées, avoueront, après quelques jours de jeûne, tout ce qu’attendent les fauves humains déguisés en juges.

Ainsi est confirmé l’adultère d’Orombello et Béatrice, leurs protestations ne dureront pas, ils devront eux aussi avouer à tout prix.

Orombello, soumis à la question pendant plusieurs jours, ne peut la supporter et avoue une faute qu’il n’a probablement pas commise. Béatrice, confrontée à Orombello, invoque Dieu comme témoin de son innocence, “ je n’ai jamais violé la foi de mon lit conjugal ” ajoute-t-elle. Elle ne se révoltera pas contre son mari, elle a encore pour lui des paroles émouvantes d’amour.

Béatrice est soumise alors à la torture, elle essaie de nier dans la douleur, mais selon un chroniqueur : “ à la vingt quatrième traction de la corde, quand la dislocation des bras est totale, l’infortunée comtesse de Tende avoue l’adultère qu’on veut lui imputer ”.

Selon le témoignage d’historiens de l’époque, le drame s’achève dans la cour du château de Binasco, dans la nuit du 13 au 14 Septembre 1418, à la faible lueur des flambeaux. Béatrice verra rouler les têtes de ses malheureux compagnons avant d’incliner la sienne sur le billot fumant de sang, alors que l’éclair de la hache traverse l’air.

Filippo Maria, déjà qualifié de matricide, venait de faire assassiner son épouse. Pâle et pressé d’effacer le souvenir de Béatrice, il fait disparaître les quatre cadavres ensevelis dans une fosse commune proche du château.

Après que les écrivains perfides, vivant à l’ombre des Visconti eurent applaudi à ce châtiment exemplaire, le temps calmant haine et passion, rétablit la vérité historique grâce à des critiques sérieux. Les romantiques trouvent là une héroïne qu’ils réhabilitent. Divers écrits, un opéra de Bellini, complétés par de nombreux tableaux, dont certains exposés à Milan, achèveront de perpétuer la mémoire de cette martyre célèbre.

A Tende, aujourd’hui encore, il est possible d’entendre le lointain écho de cette tragédie dans les ruines voisines de la haute tour des Lascaris, où, comme l’écrit le poète “ là semblable au son d’une hache qui tombe, siffle la moindre aile du vent ”.

 

D’après « Les Histoires et Légendes du Pays d’Azur », pour commander cet ouvrage dédicacé de 15 € : contacter edmondrossi@wanadoo.fr

 

Des histoires extraordinaires naissent sous tous les cieux, mais seul un cadre favorable les fait éclore.

La situation géographique du Pays d’Azur où les Alpes plongent dans la mer dans un chaos de montagnes et de vallées profondes lui confère déjà un caractère exceptionnel. Les climats qui s 'y étagent de la douceur méditerranéenne de la côte aux frimas polaires des hauts sommets sont tout aussi contrastés. Si l'on ajoute que l'homme a résidé sur ces terres d'opposition depuis ses origines, on ne peut s'étonner de trouver en lui la démesure du fantastique révélée par les outrances du décor.

Cet environnement propice ne devait pas manquer de pro­duire dans la vie de ses habitants une saga où l'imaginaire rejoint naturellement la réalité.

Depuis les milliers d'étranges gravures tracées à l'Age du Bronze sur les pentes du Mont Bégo dans la Vallée des Merveilles, en passant par les fabuleux miracles de la légende dorée des premiers chrétiens, ou les fresques tragiques des chapelles du Haut-Pays, jusqu'aux héroïques faits d'armes des Barbets pendant la Révolution française, longue est la chronique des «Histoires extraordinaires» du Pays de Nice, s'étalant dans la pierre et la mémoire de ses habitants.

Par un survol du passionnant passé de cette région, qu'il connaît bien, Edmond Rossi nous entraîne à travers une cinquantaine de récits mêlant la réalité historique au fantastique de la légende.

Rappelons qu'Edmond ROSSI, né à Nice, est entre autres l'auteur de deux ouvrages d'Histoire appréciés, dont «Fantastique Vallée des Merveilles», d'une étude sur les traditions et le passé des Alpes du Sud: «Les Vallées du Soleil» et d'un recueil de contes et légendes de Nice et sa région: «Entre neige et soleil».

 

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com

06/05/2012

LES BRIGANDS DANS LES ALPES MARITIMES

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 Le mot de brigand a le pouvoir singulier d’éveiller notre imagination et de faire éclore des rêves où se mêlent les images d’attaques de diligences et de cavernes pleines de trésors entassés. Par-delà ces fantasmes de la mémoire collective, le brigandage est une réalité historique qui remonte aux époques les plus lointaines.

Dans sa stricte définition, le brigandage désigne les violences commises par des particuliers, le plus souvent organisés en troupe, afin de voler ou piller les biens d’autrui. La notion de violence va évoluer au fil des siècles selon les types de société, mais le vol sera lui toujours sévèrement puni. Le massacre et les destructions systématiques perpétrés par de nombreuses troupes de brigands disparaissent au XVIIème siècle, après avoir atteint son apogée avec les Sarrasins des IXème et Xème siècles. L’anarchie féodale et la guerre de Cent ans (XIVème et XVème siècles) avec les “ Grandes Compagnies ” (troupes de mercenaires) puis les guerres de religion de la fin du XVIème maintiendront le phénomène. Les temps de crise, de désordre en banalisant la violence favorisent le brigandage. Aussi est-il bien normal de voir refleurir cette activité avec la Révolution.

Dans la Provence orientale et le Comté de Nice, comme ailleurs, l’Histoire et la légende ont véhiculé jusqu’à nous les échos des pillages et des exactions de ces terribles brigands. C’est dans la montagne, hors de portée de la justice et du pouvoir, qu’opèrent et s’abritent les bandits de grand chemin. Ainsi près de Tende, la sauvage vallée des Merveilles garde le souvenir gravé dans la pierre du bandit d’honneur Bensa. Redresseur de torts, détroussant le riche pour donner au pauvre, il reste présent dans la mémoire de plus d’un berger des vallées proches du mont Bégo. Ici, la tradition locale du brigandage remonte certainement à l’origine des temps, lorsque les premiers colporteurs quittant la Côte devaient s’engager dans les Alpes, vers le Nord, sur “ la route de l’ambre ”.

Les seigneurs de Tende, au XIVème siècle, feront de la rançon une véritable institution, au point de soulever les protestations réitérées des voyageurs et des marchands niçois. Maîtres du col le plus commode à franchir, ils imposèrent de lourds péages à tous ceux qui l’empruntaient, charge à eux de garantir la sécurité de la route. Cette dernière tâche ne fut pas aisée lorsqu’en 1387, un certain Jean de Cornio, chef de bande, décida lui aussi de prélever sa part en ces mêmes lieux. Après avoir écumé la Provence, de Cornio décida de se reconvertir dans l’attaque des caravanes muletières et des riches personnages transitant par la célèbre route du sel, au col de Tende.

Son activité dura trois ans sans qu’il puisse être capturé. Le comte de Tende cerna enfin Jean de Cornio et sa bande dans une grotte dominant le lac Agnel.

A cours de munition, les bandits firent dévaler les lourds coffres chargés d’or et de pierres précieuses sur leurs assaillants. Malheureusement, le riche butin roula et plongea dans les eaux profondes du lac.

Dans le Val de Blore, aux barres de Gasques, s’ouvre la grotte de la Balme muraù (murée), légendaire repaire de brigands transalpins. La tradition orale rapporte que les raids organisés depuis cette base permettaient d’écumer les vallées de la Vésubie, de la Tinée et même du Cians ! D’autres cavernes plus modestes servaient à abriter le butin, comme à la Gianari. Un ou deux gardes y veillaient nuit et jour, leurs complices étaient reconnus grâce à des sonnailles. Le produit de leurs rapines était écoulé en Piémont, atteint par le bien nommé “ Pas des Ladres ” ou par Ste Anne de Vinadio (selon J. Guigonis).

Ces mêmes bandits transalpins apparaissent dans les chroniques au petit hameau de la Blache (entre Isola et St Etienne de Tinée) en 1663. Jean Lombard qui s’acheminait vers St Etienne avec ses trois mules chargées de barils de vin, en compagnie d’un marchand de tissus venu de Grasse, fut attaqué ici et dépouillé par une dizaine de bandits Piémontais. En 1665, des brigands de même origine seront utilisés à Isola dans un différend familial, pour investir la maison de feu Pierre Puons par des héritiers dépossédés.

La mémoire a également conservé le souvenir des “ auberges rouges ” où voyageurs et riches marchands se voyaient non seulement dévalisés mais aussi quelquefois assassinés par les tenanciers de ces sinistres relais. Citons, au-dessus de Nice, sur le chemin de Levens, l’“ auberge des voleurs ” à la Colle de Revel (attesté par la découverte de squelettes). A la sortie de Revest les Roches, village étape sur le chemin de Puget-Théniers, les ruines de la “ taverne ” sont encore hantées par les fantômes des malheureux voyageurs détroussés, qui terminaient là leur voyage d’une manière imprévue.

Mais le véritable âge d’or des bandits de grand chemin, par les chroniques qu’il nous a laissé, reste sans conteste le XVIIIème siècle avec les grands noms tels que Mandrin, Cartouche et plus près de nous Gaspard de Besse. Mme V. Eleuche Santini, dans une passionnante étude sur le “ Brigandage dans le Comté de Nice au XVIIIème siècle ”, a analysé les minutes des sentences du Sénat de Nice, donnant connaissance des crimes et délits commis par des bandes armées dans notre région. Le Comté de Nice y apparaît comme un milieu favorable au brigandage avec un relief accidenté, propre à isoler vallées et villages, refuges commodes des malfaiteurs. Territoire enclavé entre trois états (France, Gênes, Monaco), les frontières du Comté, perméables, facilitent l’évasion. Enfin, pour lutter contre ce phénomène, le gouvernement de Turin ne dispose que d’un faible effectif de police (50 soldats de justice) peu mobile sur les rares routes de la Province. N’existent que des sentiers muletiers reliant villages et vallées par les crêtes, exposant voyageurs et marchandises au danger permanent des embuscades.

Plus le passage est fréquenté, plus le butin est conséquent, aussi le trajet par la Vésubie (Roquebillière) vers le Piémont, la route du sel (l’Escarène, Sospel, Saorge, Tende), ou encore le moyen pays (La Turbie, Peille) sont autant d’itinéraires visés par les voleurs. Dès les portes de Nice franchies, les négociants et leur caravanes muletières sont exposés aux agressions à main armée.

Précisons de plus, que les armes à feu sont très répandues au XVIIIème siècle dans le Comté de Nice pour permettre la chasse aux sangliers et aux loups, presque chaque homme en possède et le couteau est porté par tous.

En 1779, le Sénat de Nice déclare dans un manifeste : “ Les brigandages et les vols qualifiés, qui journellement se commettent dans la cité et ses alentours, sont chose fréquente portant atteinte à la sûreté publique ; les habitants ne peuvent sortir de leurs maisons, surtout la nuit, sans risquer d’être assaillis par les mauvais vivants et les brigands qui sont rendus audacieux pour commettre d’énormes délits, car dans l’obscurité des ténèbres, enveloppés dans des manteaux ou des capotes de marin, ils sont quasi sûrs de ne pas être reconnus et découverts … “ De jour, on noircit son visage comme le pratique le génois Louis Borfiga et sa bande, pour dévaliser un chirurgien et un paysan. Cette préméditation l’entraînera aux galères lors de sa condamnation en 1751. Fusil, pistolet mais aussi bâton servent aux brigands qui raflent un fromage, une chemise et parfois seulement quelques lires !

La prise peut être meilleure lorsqu’il s’agit d’un capitaine grainetier piémontais : mille lires ! En 1764, le brigand chef de bande Bernard Siffredi sera condamné aux galères à vie, après une capture délicate. Vivant dans la montagne, il rançonna, huit ans durant, voyageurs et muletiers pour obtenir non seulement de l’argent mais aussi des victuailles (pain, fromage, vin). Le bétail est également une proie convoitée, transféré après le vol au-delà des frontières. A cette époque, les bandes sont composées d’un effectif réduit, maximum quatre hommes, souvent de la même famille ou du même village. Ainsi les Gioanni (plus de 37 noms) de Fontan qui défrayent la chronique judiciaire de 1755 à 1769 pour brigandage, vie “ scandaleuse ” coups et blessures et homicide. Le plus célèbre, Ambroise, sera condamné par contumace à cinq ans de galères en 1755 pour avoir assommé et tué son adversaire au cours d’une rixe.

Recherché, il se cache chez ses parents qui blessent les soldats venus l’arrêter. Ambroise Gioanni récidive en 1762 en tentant d’assassiner François Gioanni et en étant complice de la mort d’une femme enceinte, Marie Gioanni. Il ne sera condamné qu’à trois ans de bannissement. Ambroise n’en a cure, en 1765 avec cinq autres Gioanni, ils attaquent, armés, une taverne du lieu. Il sera condamné avec les siens à des peines de bannissement par contumace. Ambroise sera enfin capturé en 1769. Cet “ homme criminel ”, accusé de “ vie scandaleuse, d’attentat à l’honneur des filles et des femmes de Saorge, d’insultes et de menaces avec des couteaux … ” écope de cinq années de galères.

A Tende, en 1752, à la suite de l’assassinat du notaire Gaétan Guidi, sur huit inculpés dont deux femmes, un seul homme sera puni de cinq ans de bannissement. Deux ans plus tard, les mêmes individus sont à nouveau accusés de meurtre après avoir formé une organisation dite la “ Compagnie de Cartouche ” pour attaquer et rançonner les voyageurs franchissant le col de Tende. L’écho flatteur des exploits du glorieux bandit Cartouche avait donc atteint la haute Roya !

Mandrin, un autre bandit célèbre, traverse le Comté de Nice au début de 1755, pour rejoindre la Savoie par le Piémont, poursuivi par 80 gardes français des gabelles “ armés de fusils, pistolets, armes tranchantes, tambours et fifres ”. Cette violation du territoire s’opère de Gattières à Roquesteron, tout au long de la vallée de l’Esteron, entraînant la protestation de l’ambassadeur à Paris de Charles Emmanuel III.

Gaspard de Besse, le roi des brigands de l’Esterel, opérait à la même époque sur la voie royale (à proximité de la RN7), alors seul axe de communication entre la France et l’Italie.

Pilleur de pataches, détrousseur de voyageurs, ce varois de souche, grand amateur de jolies femmes et de lingeries fines (volées), bandit d’honneur pour les uns, brigand de la pire espèce pour les autres, règne en maître absolu sur l’Esterel pendant deux ans (1779-1780).

Réfugié dans la grotte du Mont Vinaigre, à la tête d’une trentaine de malfaiteurs, il interceptera même le courrier de Rome, assurant la liaison officielle entre la France et l’Italie !

Au début de notre siècle, le chemin reliant St Laurent du Var à Saint Jeannet était toujours baptisé “ la route des brigands ”. Serpentant le long des collines à travers les solitudes forestières, cette voie conserve, près de La Gaude, le souvenir des fameux bandits de la Garbasse opérant également en 1780.

Dans le Comté de Nice de 1736 à 1792, 92 personnes seront accusées de brigandage. En 1723, la loi punit de mort le brigand de plus de 18 ans utilisant une arme. Une précision supplémentaire est donnée en 1770 : “ Si lors du brigandage, quelqu’un use de quelque traitement barbare, la peine sera la roue, ou bien le coupable sera conduit au gibet tiré à la queue d’un cheval ”. Dans la réalité, les peines de galère allègent parfois la sentence. Pour 69 brigands traduits en justice, seuls 23 seront condamnés à mort, 18 aux galères, les autres écoperont de peines diverses : galères, chaînes, prison ou bannissement.

Retenons quelques châtiments exemplaires dont le spectacle est propre à frapper l’imagination des foules :

- Laurent Brun assaille en Février 1775, sur la route de Nice à Menton, près de la Turbie, un Napolitain qu’il assomme à coups de pierre avant de l’égorger, pour s’emparer de ses affaires. Brun sera pendu et son bras coupé exposé sur le lieu du crime.

- Plus cruelle sera la peine infligée à Jules César Gioanni et J.B. Cuggia de Saorge qui avaient commis de nombreux actes de brigandage contre des muletiers, le maître de poste de Sospel et un homicide contre un parent.

Soumis d’abord au supplice des tenailles rougies, avant d’être pendus au gibet, ils furent transportés décapités au col de Brouis pour y être exposés, là où ils avaient commis leur crime (1738).

-François Bottero, autre condamné, sera également cloué sur cette même route du col de Brouis (1741).

- Avant d’être pendu, François Lions de Barcelonnette connaîtra lui le cruel supplice de la claie, pour avoir commis un meurtre atroce. En effet, ce brigand avait attaqué un aubergiste pour le voler alors qu’il était couché ! Après l’avoir enroulé dans une couverture, il l’avait une heure durant frappé à la tête avec une pierre puis lardé de coups de couteau. La malheureuse victime n’avait eu la vie sauve qu’en s’enfuyant en sautant par la fenêtre (1771).

Malgré ces châtiments édifiants, le brigandage augmente à la fin du XVIIIème siècle.

Dans la région, la peur ou la complicité des villageois, qui souvent connaissent ces bandits familiers, préparent la suite logique développée par les Barbets, durant la Révolution.

L’épopée glorieuse de ces Chouans niçois sombrera dans le banditisme, après 1796. Là encore, le relief accidenté du Comté de Nice aidera et protégera leurs entreprises, jusqu’au premier quart du XIXème siècle, en dépit d’une impitoyable répression.

Aujourd’hui, la confusion et le trouble qui atteignent notre société, réactualisent un phénomène que nous pensions relégué aux rayons de l’Histoire : celui d’un brigandage toujours vivant.

 

D’après « Les Histoires et Légendes du Pays d’Azur », pour commander cet ouvrage dédicacé de 15 € : contacter edmondrossi@wanadoo.fr

 

Des histoires extraordinaires naissent sous tous les cieux, mais seul un cadre favorable les fait éclore.

La situation géographique du Pays d’Azur où les Alpes plongent dans la mer dans un chaos de montagnes et de vallées profondes lui confère déjà un caractère exceptionnel. Les climats qui s 'y étagent de la douceur méditerranéenne de la côte aux frimas polaires des hauts sommets sont tout aussi contrastés. Si l'on ajoute que l'homme a résidé sur ces terres d'opposition depuis ses origines, on ne peut s'étonner de trouver en lui la démesure du fantastique révélée par les outrances du décor.

Cet environnement propice ne devait pas manquer de pro­duire dans la vie de ses habitants une saga où l'imaginaire rejoint naturellement la réalité.

Depuis les milliers d'étranges gravures tracées à l'Age du Bronze sur les pentes du Mont Bégo dans la Vallée des Merveilles, en passant par les fabuleux miracles de la légende dorée des premiers chrétiens, ou les fresques tragiques des chapelles du Haut-Pays, jusqu'aux héroïques faits d'armes des Barbets pendant la Révolution française, longue est la chronique des «Histoires extraordinaires» du Pays de Nice, s'étalant dans la pierre et la mémoire de ses habitants.

Par un survol du passionnant passé de cette région, qu'il connaît bien, Edmond Rossi nous entraîne à travers une cinquantaine de récits mêlant la réalité historique au fantastique de la légende.

Rappelons qu'Edmond ROSSI, né à Nice, est entre autres l'auteur de deux ouvrages d'Histoire appréciés, dont «Fantastique Vallée des Merveilles», d'une étude sur les traditions et le passé des Alpes du Sud: «Les Vallées du Soleil» et d'un recueil de contes et légendes de Nice et sa région: «Entre neige et soleil».

 

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