30/04/2008
CAGNES, UN CHATEAU FEODAL DU XIVe SIECLE
Lors de la guerre de conquête entreprise par le Comte de Provence, le castrum cagnois est investi et confié à son capitaine et fidèle compagnon Romée de Villeneuve.
En 1300 le fief appartient à Robert d’Anjou, Comte de Provence qui le restitue aux Grimaldi de Monaco.
C’est ainsi qu’en 1309, Rainier, souverain de Monaco et amiral de France, y fait élever un château. On y accède alors par une voie souterraine.
La forteresse médiévale subit de graves dégâts lors des invasions de la Provence en 1524 et 1536.
Jean Henri Grimaldi transforme en 1620 l’austère château en demeure seigneuriale. De grandes fenêtres sont ouvertes, un jardin extérieur, sorte de patio, est aménagé, un vaste escalier de marbre grimpe vers une salle des fêtes, alors qu’une large porte perce la façade donnant sur la place intérieure.
Devenu en 1635 Maréchal de camp des armées du Roi, le lieutenant général Jean Henri, sacré Baron de Cagnes, organise de nombreuses réceptions dans son élégante demeure. A sa mort en 1651, son fils Honoré sera fait Marquis de Cagnes.
Le 11 juin 1707, la flotte hollandaise débarque 1200 hommes à Cros de Cagnes, le bourg résiste cinq jours avant d’être pillé et le château saccagé par les Austro-sardes.
Le 5 avril 1710, sur l’ordre de Sa Majesté le Roi Louis XIV, le Comte d’Artagnan arrête dans le château de Cagnes le Marquis de Grimaldi, pour la fabrication et le trafic de fausse monnaie.
Une perquisition permet de découvrir un atelier installé dans les caves !…
Le dernier seigneur, Sauveur Grimaldi, se rendit célèbre par un procès où il réclama, sans résultat, la couronne des Princes de Monaco.
Emigré à Gênes à la Révolution, son château fut pillé en 1790, les marbres descellés et emportés, les boiseries utilisées comme bois de chauffage.
Vendu à plusieurs reprises le château est acquis en 1937 par la ville de Cagnes. Il abrite aujourd’hui un musée et un centre de manifestations culturelles.
D’après « Les Châteaux du Moyen-âge en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 20 € : téléphoner au 04 93 24 86 55
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23/04/2008
VENCE, LA SOURCE DES LOUPS
A une époque fort lointaine où les nymphes des bois se baignaient nues dans les eaux limpides de la source, les dieux d’alors jaloux de leur beauté, et pour en défendre l’accès aux mortels, coupèrent les rochers à-pic.
Lorsque plus tard, de séduisants chevaliers vinrent au bord de l’onde, attirés par l’aimable spectacle de ces désirables naïades aux croupes rebondies, les nymphes, pudiques disparurent les plongeant dans le plus grand désarroi.
Fâchés par l’intrusion de ces humains indiscrets, les dieux les changèrent en loups, les condamnant à errer dans les forêts alentour pour y trouver leur pitance.
La source du Riou leur étant désormais interdite, ils durent s’abreuver à celle de la Foux, devenue la Loubiane, que les dieux compatissants firent jaillir à leur intention.
Depuis ce jour, elle coule fraîche et pure vers Vence, mais sans jamais égaler celle mythique et plus abondante du Riou.
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16/04/2008
TRÉSOR DES TEMPLIERS A NICE, UNE LÉGENDE TENACE
C’est en 1135 que les chevaliers du Temple, s’établirent à Nice, occupant plus tard en 1154 un édifice désigné sous le nom de « Temple », situé dans l’actuelle rue de la Préfecture.
Hors les murs, ils disposaient de deux autres établissements, l’un, sorte d’hospice ouvert aux voyageurs franchissant le Var, installé sur la rive gauche du fleuve ; l’autre, dit de Sainte Marie, bâti dans la campagne du Ray baptisé aujourd’hui encore quartier du Temple.
C’est dans ces différentes retraites que le 24 Janvier 1308 seront interpellés, comme ailleurs en Provence, les « chevaliers aux blancs manteau » du bailliage de Nice. Cet événement avait été précédé par la rafle opérée le 13 Octobre 1307 dans tout le Royaume de France sous l’ordre de Philippe le Bel. A la suite de ce premier coup de filet, la fameux trésor du Temple avait été acheminé clandestinement dans le Midi pour être transporté ensuite en lieu sûr vers les possessions d’Orient. Il était prévu de l’embarquer au port provençal d’Antibes.
C’est dans ce contexte que se situe le récit qui suit. Chaque nuit, lorsque la cloche du donjon sonnait le huitième quart du guet, une ombre sortait du Temple du quartier Saleya, puis longeant les murs des ruelles, elle grimpait jusqu’à l’actuelle rue de Malonat au pied de la courtine imposante du bastion Saint Elme.
Parvenu devant une maison anonyme, l’homme s’arrêtait pour s’assurer de ne pas être suivi, puis se décidait à choquer la porte. S’ensuivait un rituel bien réglé : le guichet s’entrouvrait et une voix chuchotait : « Baphomet », l’inconnu répondait « Abaddon », la voix lui réclamait alors le nom ? S’établissait ensuite un dialogue où chacun donnait alternativement une des lettres formant le nom d’Emmanuel. Puis, rassemblant ces huit lettres, le visiteur prononçait le nom donné par le prophète Isaïe au Rédempteur : « Emmanuel ». La porte lui livrait alors passage.
Toutes ces précautions de conspirateur devaient aboutir à l’amoureuse rencontre d’Auger Guigonis, chapelain du Temple, avec Bertrade d’Arlac, fille du gouverneur du château de Nice. Nourri des principes ésotériques de son ordre, prudent et jaloux à l’extrême, l’amant ténébreux imposait ce protocole mystérieux pour parvenir jusqu’au nid de sa colombe. Les deux jeunes gens consacraient ensuite le reste de la nuit aux jeux d’un amour d’autant plus intense qu’il était secret.
Pourtant, cette nuit là, au delà des mots doux chuchotés à l’oreille, la douce Bertrade ouvrit son cœur pour exposer à son ami un tout autre discours.
La fille du gouverneur connaissait la disgrâce qui avait frappé les chevaliers du Temple dans le Royaume de France et l’influence exercée par Philippe le Bel sur Charles II d’Anjou, Comte de Provence et lieutenant du Roi de France.
Des bribes de conversation saisies au château faisaient état de la haine portée aux Templiers, dont la réussite et la puissance constituaient une menace parce que sorte d’état dans l’état. Les préparatifs de contingents de ces moines-soldats destinés à une nouvelle croisade, mais opérant en réalité une prudente retraite, avaient momentanément apaisé ces rumeurs.
Bertrade fit part de ses craintes à Auger et décidée à en savoir davantage, elle affirma pouvoir mieux l’informer dès le lendemain.
Bien que conscient de la menace qui pesait sur sa communauté, Auger Guigonis restait incrédule. La fuite vers l’Orient, habilement organisée, devrait mettre hors d’atteinte les glorieux chevaliers du Temple.
Disposant d’une totale liberté de mouvement, la jeune fille circulait à sa guise dans l’immense forteresse, simplement accompagnée d’une servante dévouée. Son père, militaire dur et impitoyable, n’y trouvait rien à redire se contentant simplement de lui faire un jour cette intuitive remarque : « Sachez jouvencelle que l’honneur de mon nom repose en partie sur votre tête, si un jour vous l’oubliez, je vous tuerai de ma main. » Il n’y eut plus d’autre commentaire.
Voilà comment la jeune demoiselle abandonnée à elle-même ayant rencontré le chevalier Auger de Guigonis s’en était éprise. Lui-même, avait succombé à son charme en dépit de son vœu de chasteté. Paradoxalement, cette inobservance de la règle écartait tout soupçon sur leur tendre relation.
Fidèle à son rendez-vous, Bertrade traversait chaque soir une galerie souterraine reliant le bastion Saint Elme à la petite maison de la rue Malonat. Nous étions le 20 Janvier 1308. La fille du gouverneur avait entendu parlé de lettres closes qui ne devaient pas être ouvertes avant la nuit du 23 au 24 Janvier. Consciente du danger menaçant son amant, sa décision fut bientôt prise. A la faveur d’une absence du gouverneur, elle s’empara des fameuses lettres et osa en violer le secret.
Son entreprise fut facilitée par la bague, cadeau de sa marraine Brunissande de Foix, un temps maîtresse de Charles d’Anjou et de qui elle tenait ce bijou gravé aux armes de Provence. Ainsi les sceaux brisés purent être remplacés sans éveiller l’attention de quiconque. Lorsque la nuit venue Auger rencontra sa douce aimée, son visage était triste. L’assemblée des commandeurs de Provence avait décidé de hâter le départ pour la Terre Sainte. La croisade, décidée par le Concile de Poitiers, se préparait activement.
Déjà 37 chevaliers de l’Ordre regroupés dans le bailliage de Nice avec armes et bagages, suivis des « tueropoliers » (sorte de fantassins) se dirigeaient vers Antibes pour y être embarqués. A Nice, seule une douzaine de frères et leurs écuyers restaient encore dispersés dans les trois établissements de l’Ordre.
Auger était du nombre, bien que regrettant de ne pouvoir participer à cette campagne lointaine, il se réjouissait de ne pas abandonner l’objet de sa flamme. Bertrade l’écouta puis se décida à lui avouer ce qu’elle savait. « Auger vous êtes en danger de mort, comme vos frères du Royaume de France, vous serez arrêtés le 24 Janvier, il n’y aura plus de Temple en Provence. »
Atterré, Auger regagna en hâte la commanderie pour informer ses frères qui, au début incrédules, se rendirent bien vite à l’évidence quand il dévoila non sans quelque trouble l’origine de ses sources. L’indignation et la colère suivirent ces révélations avant qu’on ne tint conseil. Il n’était pas question d’engager un vain combat contre les séides du Comte de Provence, mais plutôt de sauver à tout prix le trésor du Temple, objet des convoitises de Philippe le Bel et Charles d’Anjou.
« Frères, même si nous sommes morts ou prisonniers, notre ordre ne pourra renaître que si nous savons protéger ces ressources qui nous ont été confiées. L’amas d’argent et de bijoux constituant le trésor du Temple doit être enfouis en lieu sûr dans les meilleurs délais. De sa possession dépend la survie de notre confrérie aujourd’hui menacée. » Ainsi parla Auger. Comme il ne pouvait être question de conserver la fortune des Templiers dans un de leurs établissements, il fallait le transporter sans tarder dans une cachette insoupçonnable, avec prudence pour ne pas éveiller l’attention de quiconque. Auger eut encore recours à Bertrade pour organiser ce délicat transfert.
C’est ainsi que, déguisé en mendiant, il réussit à contacter la dévouée Marie, servante de sa bien-aimée, avant d’obtenir un rendez-vous avec sa maîtresse sur la place du marché.
Bien que prise au dépourvu la jeune fille lui proposa de trouver un moyen avisé de transporter jusqu’au Malonat tout l’or qui pourrait être enlevé. « Agissez de nuit, la rafle n’aura lieu que demain matin à l’aube ; d’ici là, j’aurai trouvé une cache sûre dans les galeries perdues des fortifications. Ce n’est point au château qu’on viendra quérir votre mont-joie. Que Dieu vous aide, je vais prier pour vous et n’oubliez pas votre serment. »
Sur ces paroles, la jeune fille s’éloigna non sans avoir laissé tomber une pièce destinée au faux mendiant qui s’abaissa, le cœur réchauffé par le simple regard de sa douce maîtresse.
La veille avant de le quitter, Bertrade lui avait demandé de venir s’enfermer au Malonat avec ses compagnons pour échapper au coup de filet et d’attendre là que le danger disparaisse.
Mais comme le jeune homme refusait, elle répondit : « S’il vous arrive malheur, je fais serment de me précipiter du haut des remparts sur les rochers du rivage, l’un de nous ne doit pas survivre à l’autre. » Auger avait promis de ne pas s’exposer par bravade, d’ailleurs que pouvaient entreprendre quatre chevaliers contre une compagnie armée ?
De retour de sa brève entrevue, le chapelain du Temple cloua sur la porte de la Commanderie un parchemin où l’on pouvait lire : « Au nom du Père du Fils et du Saint Esprit. A tous ceux qui lisent le présent, salut et miséricorde. Ce jourd’hui vingt troisième jour de Janvier de l’an de grâce et du seigneur mille trois cent et huit.
En l’honneur de Saint Barnard, il sera fait au coucher du soleil, en l’office de ce temple, une distribution générale d’aumônes, vivres et vêtements aux indigents, malingres et gagne-deniers de cette bonne ville. Saint Bernard soit loué ! »
Sitôt connue, cette bonne nouvelle se répercuta dans le petit monde des mendiants de tout espèce qui pullulaient au Moyen Age à Nice comme ailleurs. Leur fructueux métier était non seulement protégé par les mœurs mais aussi par la loi. Le soleil commençait juste à décliner derrière les collines, que déjà une foule étrange d’éclopés de tous âges et de tous sexes se mettait bruyamment en route : boiteux, estropiés, borgnes, aveugles, manchots, lépreux, guenilleux criant, gueulant, braillant, accourus des quartiers de la ville basse, cette meute de chiens hargneux se bousculait comme à la curée devant le Temple.
Lorsque les lourds battants de la porte s’entrouvrirent, une poussée brutale projeta en avant un troupeau où se coudoyaient hommes, femmes, enfants, vieillards se ruant en vociférant et jurant. Cette mêlée humaine envahit la cour intérieure de la Commanderie. Des rues voisines, débouchaient encore des retardataires clopinant, se traînant avec la dernière énergie.
La bousculade était telle que la distribution se poursuivit tard dans la nuit. Alors que les pauvres se disputaient avidement les aumônes du Temple, des ombres encapuchonnées, chargées de lourdes besaces se livraient à un étrange manège, circulant du Temple à la modeste maison de la rue Malonat.
Retournant avec leurs sacs vides, les compagnons de l’Ordre et leurs serviteurs transportèrent, telles des fourmis et sans se faire remarquer, la totalité du trésor.
Abritée dans des fondations du château, repérées grâce à un plan primitif qu’avait consulté la fille du Gouverneur, la fortune du Temple pouvait attendre là des jours meilleurs à l’écart des convoitises.
Le plan de la cachette fut partagé en quatre et remis à chacun des chevaliers pour garantir le maximum de sécurité. Avec les premières lueurs de l’aube, l’impitoyable processus d’arrestation décidé par Charles d’Anjou s’accomplissait dans toute sa rigueur.
Le Sire d’Arlac avait comme convenu ouvert les plis et dans la hâte d’en connaître le contenu n’avait pas remarqué leur violation.
A la tête d’une troupe d’hommes en arme, le gouverneur investit très vite la commanderie niçoise, abandonnée par les Chevaliers du Temple. Quelques meubles, du linge, des outils, des armes seront son seul butin. Après avoir laissé des hommes sur place, d’Arlac s’élance vers le Temple du Var. Un détachement placé sous les ordres de Mathieu Riquier de Levens grimpe vers Sainte Marie et cerne cette autre possession du Temple.
Les huit chevaliers préparés à la garde de ces deux postes, bien que secrètement alertés par Auger Guigonis n’avaient pas cru en la réalité de la menace. Ils se défendirent avec bravoure mais succombèrent sous le nombre. Pris, ils furent conduits jusqu’à Meyrargue et Perthuis où étaient regroupés les prisonniers.
Quand aux trente sept Templiers embarqués à Antibes, ils avaient déjà gagné la haute mer. Auger et ses amis, cachés au Malonat, restaient en contact avec leurs écuyers, qui, sous divers déguisements, parcouraient la région en attendant la suite des événements.
A quelque temps de là s’ouvrit à Aix le procès des Templiers de Provence, Guigonis et ses frères tinrent en dépit des risques à y assister. Presque tous condamnés à mort, leurs compagnons monteront sur les bûchers pour y être brûlés en public. Ainsi mêlés à la foule, Guigonis et les siens seront remarqués et reconnus par leurs infortunés frères qui les accuseront de traîtrise. Interpellés, ils périront eux aussi dans les flammes des bûchers.
Quelques jours après leur mort, on devait découvrir le corps déchiqueté de Béatrice d’Arlac sur les rochers battus par les vagues, au bas des tours du château. L’Histoire a conservé par delà les siècles les noms des malheureux compagnons de Guillaume Auger Guigonis ; il s’agit de Pons Béranger, Hugues Giaume et Julien Jusbert.
C’est par hasard lorsqu’on débarrassa en 1822 les restes de l’ancien château ruiné, pour transformer son site en promenade publique, que l’on mis au jour une dalle de pierre dont l’inscription intrigua les archéologues de l’époque. On y lisait cette étrange inscription :
AG GB + EMMANUEL HA IVMCCC VIII
La colline du château, truffée de souterrains et de catacombes encore partiellement explorés de nos jours, conserve dans ses flancs l’énigme du mystérieux trésor des Templiers épargné grâce à l’amour et caché là depuis près de sept siècles.
D’après « Les Légendes et Chroniques insolites des Alpes Maritimes » (Equinoxe-éditions Saint Rémy de Provence), pour commander cet ouvrage dédicacé de 23 € : téléphoner au 04 93 24 86 55.
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