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27/04/2006

DES FAUSSAIRES ATROCEMENT PUNIS

                 FAUX MONNAYAGE


Entre 1704 et 1709, sur la fin du règne de Louis XIV, la Provence connut une prolifération considérable des entreprises de faux monnayage. On signale dans la région, à Antibes, Cannes, Grasse, Cagnes, Carros et Nice, le commerce ou la fabrication de fausses monnaies. Ces activités illicites se pratiquaient presque au grand jour, et certains seigneurs locaux n 'hésitaient pas à se flatter ouvertement de battre monnaie à 1 'instar des souverains. Les enquêtes aboutissaient rarement, étouffées le plus souvent par la complicité et la protection des hauts personnages impliqués dans ce trafic. Le pouvoir central informé de cette situation pernicieuse par l'intendant Lebret décida d'intervenir pour y mettre un terme. Il fut aidé dans sa tâche par un officier célèbre, gouverneur à Grasse: le comte d'Artagnan. Un spectaculaire coup de filet envoya aux cachots de l'île Sainte Marguerite seize personnes accusées de faux monnayage. Cette opération s'avéra très vite infructueuse, les véritables coupables ayant réussit à se défiler à la faveur de leurs relations avec les indicateurs. Le 5 avril 1710, le gouverneur de Grasse sera plus heureux dans sa perquisition au Château de Cagnes où le marquis de Grimaldi sera arrêté. Puis avec le concours de M. de Saint Maurice, chargé d'instruire ces affaires devant un tribunal spécial siégeant à Cannes, le bilan va s'étoffer, les condamnations prononcées par la cour qu'il préside en témoignent :
- 15 condamnations à mort suivies d'exécution, précédées de tortures,
- 5 condamnations aux galères à perpétuité,
- 3 aux galères à temps,
- 2 au bannissement perpétuel,
- 6 au bannissement à temps,
et enfin un grand nombre d'amendes variant de 2000 à 1000 livres. Les condamnations à mort et aux galères s'accompagnent le plus souvent de la saisie et de la confiscation des biens des condamnés.
Les séances de torture étaient telles qu'il fallut pour un condamné attendre son rétablissement avant de l'envoyer aux galères. Des femmes impliquées dans ces affaires furent attachées deux heures durant à un carcan dressé sur la place de Cannes un jour de marché, puis «fustigées» à nu sur les épaules «par les rues et carrefours accoutumés de la ville, avant d'être bannies».
Un prêtre faux monnayeur, soumis à la question ordinaire puis extraordinaire avec des mèches allumées entre les doigts, s'exclamait:
 «Ah! Mon Dieu, ne me tourmentez pas, j’ay dit la vérité et je n'en diray pas davantage». Condamné à mort il fut pendu sur la place d'Antibes. On rasa sa bastide d ' Annot et sur les décombres on dressa un poteau portant une plaque de cuivre avec le texte de sa condamnation.
La cour jugea même un mort ! Il s'agissait d'un taillandier en or de Draguignan qui avait péri dans les geôles de l'évêque de Fréjus. Suicide ou accident ? On décida que «la mémoire de l'accusé demeurerait condamnée, éteinte et supprimée à perpétuité, son cadavre attaché serait traîné sur une claye, la teste en bas et la face contre terre, par les rues de Cannes, jusqu'à la place dudit lieu où il serait pendu par les pieds à une potence et jeté à la voirie, après avoir été exposé pendant deux heures».
 
Rares seront les foyers de faux monnayages qui subsisteront après septembre 1710. 66 fabriques de fausses monnaies avaient été détruites, la mission de M. de saint Maurice s'achevait par un succès indéniable.
 

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21/04/2006

UN VILLAGE MAL FREQUENTE

«LI TAILLA BOURSA»

Les gens de l'Escarène auraient, selon la légende, joué un bon tour au Diable qui un soir débarqua en anonyme voyageur dans leur bourgade. Pourquoi cette visite dans un village si tranquille ? Lucifer avait rencontré en Enfer bon nombre «d'Escarenascs» venus y expier leurs forfaits.

Aussi, il décida d'aller y voir de plus près.

En effet, étape importante et indispensable sur la route de Tende entre le col de Nice et celui de Braus, l'Escarène voyait défiler chaque jour voyageurs, pèlerins, marchands et notables de toute sorte circulant entre Nice et Turin.

Nés de cette nécessité, les services offerts sur place dépassaient souvent par leurs prix les normes en usage. Aubergistes, bourreliers, charrons, maréchaux-ferrants profitaient tous de cette halte privilégiée pour étriller le client. Très vite leur renom de «tailla boursa» (tire-laine) dépassa les frontières. I1s ne devaient pas l'emporter au paradis, à la grande satisfaction du Malin. Sitôt descendu de la diligence, Lucifer s'était dirigé à l'auberge de l'Ecu d'or tenue par Maistre Barelli. Très à l'aise dans cette chaude ambiance, le Diable provoqua de nombreuses parties à «1' amora» défiant muletiers et cochers, les malheureux finirent par se mesurer jusqu'à s'empoigner par le col! Il faut dire que le repas avait été copieux et bien arrosé. Satisfait du trouble produit, il demanda après avoir commandé une dernière tournée à regagner sa chambre.

C'est alors qu'il remarqua, tout excité, la jeune et jolie servante, la bien nommée Patchoulette.

Après l'avoir lutinée, il lui murmura à l'oreille des propos à faire rougir un diable ! Grimpant à l'étage, celle-ci qui en avait entendu d'autres, suivait son hôte dans les escaliers une bougie à la main. Quelle ne fut pas alors sa stupeur en voyant dépasser de la houppelande de son entreprenant ami une queue poilue qui semblait en dire long sur ses intentions. Tremblante d'émotion, Patchoulette réussit tout de même à trouver le trou de la serrure et ouvrir la porte de la chambre. Puis prétextant qu'elle avait oublié de bassiner le lit, elle s'esquiva en promettant à Lucifer tout échauffé de revenir aussitôt. En un éclair, la découverte de la malheureuse fit le tour des cuisines et du cabaret. Maistre Barelli, homme avisé, la rassura: un homme normalement constitué ne pouvait posséder un tel appendice, pas de doute c'était bien le Diable en personne! On courut réveiller le curé. Mais déjà l'aubergiste avait son idée. Un client comme celui-là qui savait si bien faire tinter ses pièces d'or en commandant son vin n'allait pas lui échapper si vite. Un peu sorcière, sa femme prépara en un tour de main une infusion détonante de fleurs de belladone et de digitale dans un vin chaud propre à terrasser un bœuf.

Barelli, montant avec son bol fumant jusqu'à la chambre, apaisa son hôte: qu'il ne s'impatiente pas, Patchoulette s'apprêtait, elle n'allait pas tarder. Ses soupçons se confirmèrent quand il vit l'autre avaler d'un trait le breuvage brûlant, c'était bien le Diable !

Bientôt assommé par la préparation soporifique, qui avait déjà servi en d'autres occasions, Lucifer s'endormit ronflant, allongé en travers du lit. Il ne lui restait plus qu'à lui voler sa bourse, 'c'est ce que fit lestement l'aubergiste.

Lorsque le curé parvint enfin à l'auberge, encadré de ses deux enfants de chœur ensommeillés, il put à souhait asperger le Diable d'eau bénite. Sous l'effet de la sainte douche, Lucifer s'éveilla et se tordit de douleur. Sautant par la fenêtre en hurlant, il s'enfuit à toutes jambes vers le col de Nice.

Il ne réapparut plus à l'Escarène, mais à Berre quelques jours plus tard. Mais ceci est une autre histoire...

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15/04/2006

SORCELLERIE

           SORTILEGES ET

 

 SORCELLERIES (3 ème partie)

 

Plus grave sera l'affaire Maïssa évoquée quelques années plus tard, après celle de Trastor. Jean Maïssa, âgé de 28 ans, prieur à la Roquette, se voit accusé de lourdes fautes par divers témoignages, avoir mangé des vers et un potage aux oeufs au milieu du Carême (!), encouragé des hommes violents à la querelle, dit la messe sans dévotion, blasphémé, porté des armes, conseillé d'aller chez les femmes de mauvaise vie, promis d'absoudre ceux qui suivraient ce conseil, oublié le pater noster lors d'une messe, bas tonné ses paroissiens, eu des attitudes indignes de sa charge, circulant sans habit clérical, ivre un poignard à la main, etc... Traduit devant l'évêque Martinengo, une visite de son presbytère permit de découvrir des figures étranges tracées sur des feuillets: dessins, cercles, inscriptions cabalis­tiques. Masino, le dénonciateur, avouera avoir demandé au prêtre un secret pour charmer une femme qu'il désirait. Il sera aussi question d'un livre d'amour capable d'envoûter et de faire céder les femmes. Interrogé au château de la Roquette, puis au château épiscopal en présence de l'évêque et de ses conseils, Maïssa ne risquait au départ qu'une amende et l'excommuni­cation.

Tout va plonger dans le drame lorsque le tribunal décide de le soumettre à la torture, «pour arracher la vérité, tant à l'inculpé qu'à ses complices». L'évêque ordonne la torture pour Maïssa, le 26 janvier 1612, en précisant que le sang ne soit pas versé. Le 28, à la prison en présence du procureur fiscal, l'évêque s'étant fait excuser pour raison de santé, l'accusé est examiné par le chirurgien Risso avant de subir le supplice de l'estrapade. Dévêtu, mains liées derrière le dos, pieds attachés aux cuisses, hissé au sommet de la potence par une corde entourant ses poignets, le pauvre homme sera précipité à plusieurs reprises d'une hauteur de trois mètres, risquant chaque fois dans d'atroces souffrances de voir ses membres se disloquer. Les papiers suspects vont lui être présentés durant cette séance pour qu'il en avoue la provenance. Maïssa subira l'épreuve avec courage, criant «Madona santissima», ouvrant les yeux et regardant les documents sans rien révéler. Trois quarts d'heure de supplice du malheureux prieur n'aboutiront à aucun aveu. «Un peu malade», il devra être visité dans les jours qui suivirent par le médecin Gapéani. Son état inquiétant entraînera même le chanoine Giaucelletti à l'entendre en confession.

Les dépositions de nombreux témoins à décharge viendront contredire les accusa­teurs, faisant balancer la justice dans le sens de la clémence. Bien que formellement accusé de sorcellerie, l'inculpé sera seulement condamné à être privé de ses «biens et bénéfices». L'analyse des témoignages laisse supposer une lutte d'influence entre Maïssa et les seigneurs de la Roquette agacés par le comportement désinvolte de leur prieur.

Oublié de ses persécuteurs, Maïssa disparaîtra lui aussi des chroniques d'un temps où la cruelle crainte des forces obscures se mêlait à celle des serviteurs du Diable.

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