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21/05/2008

VALLÉE DES MERVEILLES, DES SORTILÈGES AUX MALÉFICES

La Vallée des Merveilles et ses environs arborent des noms évocateurs chargés de sortilèges et de maléfices.

La tradition a conservé pour ces sites étranges ou merveilleux des noms évoquant les sentiments divers partagés par les audacieux qui s’y hasardaient.

Que de fantasmes sont nés de ces paysages sauvages inaccessibles une grande partie de l’année, de ces roches abruptes dominant des déserts de pierrailles battus par les vents et les orages, de ces figures insolites tracées sur la pierre !

Ces appréhensions, ces craintes se sont concrétisées dans des dénominations révélatrices qui ont véhiculé jusqu’à nos jours les mentalités des premiers visiteurs.

A ce titre, ces noms de lieux constituent des vestiges spécifiques à la Vallée des Merveilles, capables de fournir des informations sur son passé et sur les frayeurs  qu’elle a fait naître.

Nous classerons cette toponymie en trois groupes : le premier relevant du culte ou de la peur inspirée par le site, le second des pratiques pastorales et le dernier des termes descriptifs.

Centre de gravité sur lequel pivotent toutes les exigences culturelles de la région : le Bégo a vu son nom décliné dans toutes les langues. De Bégum venant du radical Beg, signifiant seigneur en indo-européen, il est devenu Bekkos, dieu chez les Grecs, Baigorix avec le même sens chez les Celtes, Bog chez les Russes et même Bâga en mongol, l’étymologie étant toujours d’origine divine.

Plus prosaïquement, nous proposerons : Bégo, du gaulois becco ou bec, pointe, sommet. Mais la filiation des deux termes reste la même : Beg, radical signifiant le dominateur, le sommet ou le dieu.

Bobba appuie son explication sur une légende selon laquelle une divinité rustique Bekkos, correspondant au Pan des latins, aurait présidé la religion du Bégo dans l’Antiquité…

Dans l’esprit du culte taurin répandu à la préhistoire, il est bon de signaler : la Cima del Toro dominant le chemin d’accès, depuis la vallée du Gesso et le Piémont par le col de Sabion. Il existe plusieurs exemples en rapport avec les cornes, thème majeur des Merveilles, mais aussi attributs caractéristiques du Diable.

Le premier est situé sur le chemin de Transhumance (draille) s’ouvrant vers la Provence dans le massif de l’Authion, il s’agit des Mille-Fourches, voisinant le quartier de la Forcat qui en confirme l’étymologie.

Dans la même vallée, le lac Forcat ou Fourcat reprend cette idée du fourchu.

Plus explicite encore, la pointe de la Corne du Bouc retient la même notion, elle fait face aux pentes sud du Bégo. Le même animal cornu est repris à proximité du col de Sabion, avec la cime et le col Vei del Bouc (d’où l’on voit le Bouc).

Ne figurant plus que sous son nom de col de Tende, la grande porte alpine conserva jusqu’au XVII ème siècle l’appellation de col de Cornio, en relation avec le site voisin des Merveilles où pullulaient les insignes d’un culte en forme de cornes ou peut-être en souvenir du terrible brigand Jean de Cornio, détrousseur des voyageurs franchissant ce passage.

Ces terres minérales, aux cimes effrayantes, forment une zone métallifère exceptionnelle, porteuse d’uranium radioactif, chargée d’oxydes teintant les roches et de plus propres à attirer la foudre tout comme à dérégler les boussoles !

Les influx émis par ces propriétés du relief ne pouvaient que troubler les visiteurs de ces lieux déjà sous le charme du décor.

En ce qui concerne les anciennes frayeurs dégagées par ces paysages, la liste en est abondante : le col, la cime et le lac du Trem (tremblement de terreur), près de la cime du Diable, le mont del Frisson au-dessus du vallon du Sabion, le val d’Enfer, la cime du Diable (Testa del Inferno en italien), la Valmasque (vallée des sorcières jeteuses de sort), le val et la cime des Merveilles avec ses sortilèges et ses maléfices où la beauté fascinante côtoie les pires dangers.

Plus haut dans le nord, le mont Matto (le mont fou), la cime de la Maledia (la malédiction) ajoutent leurs épouvantes à la Rocca de l’Abisso (l’abîme).

Plus anecdotiques, la cime et le col des Verrairiers (des gens sincères) rappellent les châtiments qui menaçaient les menteurs pénétrant sur les terres du Diable.

Provocateur et téméraire, le mont Sainte Marie se dresse au nord du Bégo pour faire échec au paganisme. Couronnant le val d’Enfer criblé de lacs, le mont Macruère  recèle dans ses syllabes le sens de la cruauté associée au sang, mais garde le secret de ses origines.

Le second groupe où transparaissent les pratiques pastorales nous offre : Le Chanvrairée ou Cianvraireo (plateau des chèvres), l’Arpette (l’alpage), les monts Agnel et Agnelet (agneau et berger), la cime de la Nauque (auge abreuvoir) sans compter les multiples gias (bergeries).

Plus classique le dernier ensemble  présente les termes descriptifs habituels : lac noir, vert, carbon (charbon), la cime de Chamineye (couloir, ravin, cheminée), cime de la Charnassère (forêt), cime du Scandail (escandail, balance romaine), cime de la Lusière (billante, luisante, lumineuse), lac de l’Huile aux eaux figées et dormantes comme l’huile, Valaurette (petite vallée ventée, pour certains vallée dorée !), cime du Capelet (de cap, pointe), mont Paracouerte (pierre couverte : dolmen non repéré), Peyrafica (pierre plantée, fichée : menhir à retrouver), Ciappe ou Chape (roches lisses), vallon du Caïros (éboulis de pierres).

A cette dernière série, nous pourrions associer les noms dérivés des récits ou légendes mettant en scène tour à tour : la muette (de peur ?)  du lac de la Moute (muta) ; un habitant de Saorge, proche village de la Roya, dans le lac Saorgine ; le bât d’un mulet perdu dans le lac du Basto, ainsi que la fontaine blanche

( comme l’albâtre) de la Fontanalbe.

Ce bref coup d’œil sur une toponymie  pittoresque née des angoisses du passé serait incomplet sans la découverte des contes, fables et autres histoires, découlant de ces lieux impressionnants, propres à frapper l’âme humaine.

D’après « Les Aventures du Diable en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 18 € : téléphoner au 04 93 24 86 55

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé :

Cliquez sur

http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com

 

09:46 Publié dans HISTOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire

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