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28/11/2007

LA TOUR SUR TINÉE: LE TRIOMPHE DU DIABLE

Pris dans un univers accidenté entre la pierre et le soleil, soumis à l’autorité de l’Eglise, l’homme des Alpes Maritimes a su ménager la part secrète de l’imaginaire. Malgré son adaptation aux croyances agraires issues du paganisme, l’Eglise n’a pu canaliser les comportements nés du rêve et de la superstition. Ainsi apparaissent ces recettes venues de la nuit du temps qui rassurent face aux périls inexpliqués qu’apporte la vie de tous les jours. Ces réalités ne sont pas à reléguer dans le catalogue des pratiques oubliées, puisqu’en 1960, on allait encore consulter la sorcière du village et  que, récemment encore, le clergé se distinguait en conjurant à force d’incantations les possibles menaces visant les récoltes. Plus qu’ailleurs, les régions intérieures écartées, placées dans un isolement propice, devaient accueillir et faire foi aux messages obscurs de la magie et de la sorcellerie. Les artisans en étaient «le magou », tour à tour mage et rebouteux ou encore «la masca », plus inquiétante et redoutable, jeteuse de sorts, bien souvent associée au Diable, «lou diaou ». Ce personnage central, se retrouve dans un grand nombre d’expression et dans la toponymie, servant d’explication commode à tous les mystères et principalement aux pires. Les roches aux formes étranges, les colonnes chapeautées d’une pierre, les sources intermittentes, les signes gravés dans la Vallée des Merveilles étaient mis au crédit de ce grand pertubateur. Pour écarter cet intrus, le clergé médiéval et celui des époques plus récentes n’hésitaient pas. A titre d’exorcisme permanent, il faisait planter des croix le long des chemins, dresser des oratoires sur les cols et autour des villages, comme de véritables cordons sanitaires. Présent dans la nature, il est aussi dans les esprits : particulièrement dans les peintures murales des chapelles de Clans, Roubion, La Tour, Venanson qui font la part belle aux sept vices. Ils se suivent dans une pittoresque cavalcade tirée vers l’Enfer par un Diable énergique ; attachés l’un à l’autre par une longue chaîne, un second diablotin en queue presse la colonne. L’étonnante caravane défile sur les murs de plusieurs sanctuaires des Alpes du sud. L’Orgueil, plume au chapeau, tout fringuant, chevauche un lion ; l’Avarice, sac d’écus en main, monte un quadrupède variable ; la Luxure est à califourchon sur un bouc ou un chamois (Roubion), elle est figurée parfois sous les traits d’une élégante, robe retroussée, se regardant dans un miroir ; la Colère placée sur un ours ou un dragon (Roubion) se perce la gorge avec une épée ; la Gourmandise à cheval sur un porc ou un loup porte un jambon sur l’épaule, l’autre main brandissant une bouteille de vin bue au goulot ; l’Envie sur un léopard ou un renard indique du doigt son mauvais œil ; la Paresse, enfin, s’endort sur un âne aux pattes chancelantes. Le Diable s’active, entraînant la marche au son du fifre et du tambour ; à La Tour il s ‘agite sur l’épaule de l’Avarice. A Notre Dame des Fontaines, les démons tourmentent les damnés avec divers instruments de torture, dévorent déchiquettent, étranglent, aidés par de monstrueux serpents.   La chapelle des Pénitents Blancs de La Tour, possède des fresques datées de 1491, œuvre de Gérard Nadal et Brevesi Curraudi. Dans un panneau Saint Bernard tient en laisse un diable qui est ici le démon des cols alpestres. Comme les vertus, les vices sont vigoureusement représentés, enchaînés les uns aux autres par le cou et montés sur des animaux divers, ils se dirigent vers la bouche de l’Enfer, portant de petits diables sur leur épaule. L’Orgueil est assis sur un lion, la Luxure sur un bouc, la Colère sur un léopard, la Paresse sur un âne, les trois autres, détériorées, chevauchent des montures mal aisées à définir. Ici, la Luxure parée d’un collier en torsade monte  impudemment un bouc des plus hauts, fortement encorné et doté de puissants attributs sexuels. Une main prude a délicatement gratté la peinture à cet endroit. Bien que tenant un miroir, elle se tourne face au spectateur, la main sur la hanche, dans une provocante attitude d’invite. Le chevet porte un remarquable Jugement dernier. Au sommet le Christ, avec l’épée de l’apocalypse sortant de la bouche, est assis sur un arc-en-ciel, entouré de Marie et Saint Jean Baptiste. Les anges sonnent de la trompe, alors que les morts sortent de leurs tombes rectangulaires creusées dans le sol herbeux. Plus bas à droite du Juge, un gigantesque Saint Pierre, aidé d’un ange, conduit six petits élus entièrement nus vers le Paradis, représenté par une citadelle crénelée. Il enfonce sa clé dans la serrure pour leur ouvrir la porte, au-dessus de laquelle veille un ange. A l’opposé, un grand diable lui fait pendant du côté des réprouvés, muni de quatre cornes, avec un croc unique retroussant sa lèvre inférieure. Il avance déterminé à grand pas vers la gueule de l’Enfer, pour y verser le contenu de sa hotte composé de quatre damnés grelottants, désormais assurés d’être au chaud. Ce pourvoyeur de géhenne porte sur l’épaule un bâton, au bout duquel est ficelé un minuscule bonhomme coiffé dérisoirement d’une mitre en papier, sur laquelle est dessiné un allègre diablotin. Ce bonnet infamant était réservé aux victimes de la terrible Inquisition, condamnées à l’autodafé comme suppôts de Satan.

D’après « Les Aventures du Diable en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage illustré et dédicacé de 18 € : téléphoner au 04 93 24 86 55

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24/11/2007

LE SINISTRE FESTIN DE ROCCASPARVIERA

Roccasparviera, village ruiné perdu au fond de la vallée du Paillon au dessus de Coaraze, reste un site marqué de funestes légendes. Quelques pans de murs gris accrochés au rocher, un peu à l’écart sur un piton une modeste chapelle dédiée à Saint Michel exorciseur du Démon, c’est tout ce qui subsiste de ce lieu riche en récits tragiques mêlant meurtre et trahison. Ici, l’imaginaire retrouve la brutale réalité d’un décor lugubre, propre à raviver la mémoire de ces conteurs de jadis, évoquant dans leurs relations le sang du crime, la malédiction et la vengeance. Peu connue et en rapport avec la tradition orale, l’histoire suivante est due à Paul Canestrier qui sut s’intéresser au destin dramatique de ce malheureux village. Le seigneur de Roccasparvièra avait deux fils, Antonio et Paolo, qui s’éprirent de la plus jolie demoiselle, fille d’un baron voisin. Le seigneur de Roccasparvièra mourut et la demoiselle préféra Antonio, l’aîné, parce qu’il héritait du fief de son père. Paolo dévorait sa rage en silence. La noce fut célébrée en grande pompe, en présence de tous les châtelains de la région. Dans la grande salle du château, on mangea beaucoup de venaison arrosée de vins généreux. Quatre serviteurs posèrent sur la table un sanglier rôti qu’entouraient des marcassins enrobés de pâte dorée. Paolo leva sa coupe, en l’honneur de la jeune épousée, rayonnante de joie. « Belle sœur, dit-il je compte vous rendre un jour ce repas de noces ». Puis il disparut. La tradition rapporte qu’il avait pris soin de ferrer son cheval à rebours pour que l’on ne sût de quel côté il était parti. Le bonheur régnait au château de Roccasparvièra, trois fils comblaient les vœux les plus chers d’Antonio. Son aîné avait 20 ans, quand un jour, au retour de la chasse, Antonio apprit que les Sarrasins du Fraxinet de saint Hospice dévastaient la vallée du Paillon et s’étaient approchés de Coaraze. Ils avaient à leur tête un homme de haute taille qui se distinguait  par son acharnement féroce contre les malheureux villageois. Il portait l’armure de fer des chevaliers chrétiens, et on l’avait surnommé le renégat. Antoine fit barrer les deux portes du village où aboutissaient les deux sentiers en zigzag dans le rocher. Des hommes postés au bord de l’abîme tout autour du village étaient prêts à rouler des blocs sur les assaillants. Par une nuit noire, orageuse, les Sarrasins s’insinuèrent dans un souterrain, connu seulement du châtelain, et parvinrent au manoir. L’homme à l’armure de fer dirigea le massacre. Il égorgea lui même le seigneur de Roccasparvièra et se penchant sur sa victime, lui murmura quelques mots à l’oreille. Le mourant le regarda avec effroi et rendit l’âme. L’homme à l’armure de fer entra dans les appartements de la châtelaine. - Madame, lui dit-il je suis Paolo votre beau-frère et je viens vous rendre votre repas de noce, selon ma promesse. A ce moment, un sarrasin entra et annonça « Monseigneur est servi. » Paolo offrit le bras à la châtelaine apeurée, tremblante. Sur la table de la grande salle, un plat immense était recouvert d’un voile. Paolo le fit découvrir. Alors apparurent les cadavres ensanglantés du seigneur de Roccasparvièra et de ses deux fils. - Madame ajouta Paolo, plat pour plat : Voici le sanglier et les marcassins. N’ai-je pas tenu parole ! La châtelaine jeta un grand cri et s’évanouit. Quand elle eut repris ses sens, elle était folle et ne cessait de chanter une vieille complainte qui prédisait la ruine du château.

Vai, ô rocca, roquina

Va, roche, rochette
Un, aultre temp sara Un jour viendra
que sobre te reina Où sur tes ruines
Plu noun li cantera Ne chantera plus
Le gal ni la gallina Le coq ni la poule,
Ma les crôos, los sparviers, Mais les corbeaux et les éperviers
El altre aosels salvagiere Et autres oiseaux de proies

Elle mourut quelques jours après. Heureusement, le plus jeune fils d’Antonio se trouvait dans la montagne, chez un paysan qui l’entraînait à chasser le chamois. Paolo s’installa au château de Roccasparvièra avec des sarrasins. Il se livrait à l’orgie, au meurtre, au pillage et terrorisait les habitants. Une fois, il s’en alla très loin, dans un val qu’il ne connaissait point, à la poursuite d’une harde de chamois et s’égarât à la tombée de la nuit. Il rencontra un jeune chasseur vêtu comme un gentilhomme. « Manant, cria-t-il, ramène-moi à Roccasparvièra et tu auras une bonne récompense. » Monseigneur répondit le jeune homme, nous en sommes à plus de huit heures de marche ; la nuit descend et les sentiers sont très dangereux. Venez vous reposer dans mon pavillon de chasse, à quelques pas d’ici ; je vous recevrai de mon mieux et au petit jour, je vous accompagnerai ! Paolo le suivit sans méfiance dans une chaumière spacieuse, bien tenue. Le jeune homme l’installa devant un bon feu, le laissa quelques instants et revint. - Sa seigneurie est servie ! prononça-t-il d’une voix profonde et calme. A ces mots, Paolo tressaillit. Il suivit le jeune homme dans la pièce voisine. Un voile recouvrait un objet volumineux placé au centre de la table. Monseigneur, dit le jeune homme, je ne puis vous offrir ni sanglier ni marcassin, je le regrette, mais chacun fait selon son pouvoir ...

Il souleva le voile. Un cercueil vide apparut. Deux hommes embusqués sous la table saisirent Paolo et le couchèrent dans la bière qu’ils descendirent dans un caveau.

Toutes les nuits, à l’heure où Paolo avait égorgé son père et deux de ses frères, le justicier ouvrait la trappe du caveau et montrait au prisonnier des quartiers de sangliers. « Monseigneur est servi. » Le douzième jour, Paolo mourut de faim et de rage. Le jeune seigneur de Roccasparvièra se mit à la tête des habitants et chassa les sarrasins du village. Puis il mit le feu au château qui avait été le théâtre de tant de forfaits. Ayant ainsi vengé sa famille, il s’en alla en pèlerinage à Jérusalem.

Edmond ROSSI

D’après « Les Légendes et Chroniques insolites des Alpes Maritimes » (Equinoxe-éditions Saint Rémy de Provence), pour commander cet ouvrage dédicacé de 23 € : téléphoner au 04 93 24 86 55.

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20/11/2007

LA COMMANDERIE DU BROC, DES VESTIGES TEMPLIERS EXCEPTIONNELS

L’histoire de  la  petite seigneurie de La Bastide-Saint Laurent  dont les ruines hérissent  encore  le Baou des Blancs, haute falaise calcaire dominant Vence,  se confond avec  le  passé  tumultueux de  l’antique cité.

Selon l’historien local Tisserand, les populations de Vence  sous la direction de leur évêque, le bienheureux Deuthère, se seraient réfugiées  sur les Baous vers 578, la ville étant saccagée par les  terribles Lombards.

Sur  les  fondations  d’un «castellaras » protohistorique, les habitants commencent alors à édifier une grande  forteresse pour s’y abriter et  quitter les grottes voisines où ils s’étaient cachés avec leurs biens  les plus précieux.

Une église dédiée à Saint Laurent y fut consacrée, de cette lointaine  époque daterait la fondation  de La Bastide-Saint Laurent. Aucune  mention du lieu n’est faite avant la troisième invasion musulmane. Vers 732, les bandes de Sarrasins envahissent la Provence orientale, à Lérins 505 moines périssent sous les cimeterres, Toulon, Fréjus, Antibes et Nice ne peuvent résister au pillage. Vence est à nouveau complètement  rasé et les sommets des Baous  servent encore de refuge. Selon L. Dailliez, cette  période mouvementée  marquerait la naissance du «castrum » (village fortifié) de La Bastide-Saint Laurent. Plus précises, les annales de la ville nous apprennent qu’en 933 la population, décimée  par une  nouvelle incursion sarrasine, regagne  la chaîne des  Baous et y édifie les premiers éléments de La Bastide-Saint Laurent ou encore Saint Laurent- La Bastide.

Cette hypothèse est soutenue par J.C. Poteur qui ajoute  que : « le groupe épiscopal de Vence est reconstruit, sur le site antique ou non loin, dès l’époque carolingienne ». Toujours à la fin du Xe siècle, de nouveaux seigneurs régionaux de l’entourage de Guillaume de Provence dit «le libérateur », les Mévouillon, vicomtes  de  Nice, occupent les fortifications de  l’éperon du Baou des Blancs où ils dressent un château. La  famille de Saint Laurent est présente dès 1033 à la cour des vicomtes de  Nice.

 La seigneurie transmise  aux Templiers en 1195 avec un but militaire évident, leur sera confirmée en 1215, lorsque  Rostang de Saint Laurent reçoit les biens du Cayron. Il est invité à cette occasion par l’évêque «à protéger les habitants en veillant  sur  les gardes de son monastère ».

Le toponyme de Baou des Blancs ou rocher  des « Blancs» pourrait être en rapport avec la présence en ces lieux des chevaliers au « blanc » manteau. D’après J.C. Poteur, au début du XIIIe siècle l’église Saint Martin, bâtie au pied du Baou, aurait été fortifiée par le Comte de Provence, à l’occasion des luttes  l’opposant  aux aristocrates. Le château Saint Martin aurait alors contrôlé la voie reliant Vence au Haut Pays, tout en permettant le siège de la forteresse de Saint Laurent La Bastide, échappée pour un temps à la tutelle des Templiers, alliés fidèles du Comte. Les opérations achevées, Raymond-Bérenger V comte de Provence cède par acte du 15 décembre 1229 à son loyal serviteur le baron Romée de  Villeneuve, entre autres fiefs, ceux de Vence et de Saint Laurent de Vence. Cette décision mettra définitivement fin au consulat de la cité de Vence. J.C. Poteur émet l’hypothèse d’une éventuelle cession du château Saint Martin aux dévoués  Templiers, à cette  même époque. Soucieux de stimuler l’économie de Vence, Romée de Villeneuve va  y attirer les populations des alentours. Néanmoins, Saint-Laurent-la-Bastide moins peuplée apparaît affouagée en 1252, puis en 1297, dans l’enquête dite de Saint Jean et encore en 1315. Seule la Bastide est maintenue comme forteresse, avec son église  paroissiale. Le château Saint Martin, faussement désigné comme «castrum »(village fortifié) en 1232, a été supposé devenir au XIVe siècle une forteresse des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem, ces héritiers et successeurs des Templiers. Ils auraient géré depuis cette maison leurs possessions locales de Vence et Saint Jeannet. Cette attribution, à un ordre militaire et religieux a contribué à amplifier la confusion sur la présence templière en ces lieux, certains y voyant le siège d’une commanderie. Or les biens du Temple à Vence n’étaient plus, dès 1338, dans l’enquête de ceux relatifs à l’Hôpital, ils avaient déjà été concédés aux seigneurs de Vence. Le château Saint Martin édifié au début du XIIIe siècle par le Comte de Provence, pour asseoir son autorité lors de la guerre contre les aristocrates rebelles du lieu, sera d’abord remis à son fidèle lieutenant Romée de Villeneuve en 1229 et restera ensuite propriété de la famille des Villeneuve-Vence, jusqu’à sa destruction en 1707, par un régiment hongrois des troupes impériales. Il est donc improbable que cette forteresse ait pu être dévolue aux Templiers puis aux Hospitaliers pour servir de siège à une quelconque commanderie.  Dans l’évêché de Vence, l’Ordre disposera de 88 services, le rendement en espèces des tenures s’élevait à 3 livres dont  une livre et 4 sous à Vence et 1 livre et 10 deniers au Broc. Les biens de la maison de Vence vont être inventoriés lors de l’arrestation des Templiers en Provence. A cette occasion les représentants du Comte : Etienne de Vence, Bertrand Falcoz, Paul de Palena, Guillaume Mayfred et Guillaume Beroard de Vence visitent le bailliage de Villeneuve. Ne connaissant ni les membres ni les censitaires de l’Ordre, répartis dans le bailliage, les officiers de Villeneuve procédèrent à une criée en langue provençale, dans les diverses localités du diocèse de Vence, pour que les intéressés se présentent devant Guillaume Gaillard, châtelain de Villeneuve, jusqu’aux premiers jours de février. Cette mesure peu discrète alerta les derniers Templiers des lieux qui purent ainsi échapper aux sergents en armes. Le recensement releva le 28 janvier 21 services au Broc, Après avoir remis leur inventaire au Sénéchal, les envoyés du Comte de Provence nommèrent à Villeneuve Guillaume Beroard de Vence comme administrateur unique de l’ensemble des biens du bailliage. L. Dailliez précise que « après la suppression, les biens de Vence passèrent à l’évêché et au baron de Villeneuve qui se partageaient la seigneurie, en compagnie du chapitre canonial de la ville ». Ceux de La Gaude seront rattachés à la maison du Broc passée à l’Hôpital. L’inventaire des biens de la commanderie de Vence, recensés dans de nombreuses localités a pu entraîner l’attribution abusive de certains monuments ou vestiges au bénéfice du Temple. La prudence et la rigueur historique imposent d’en vérifier l’authenticité, à la lumière des archives et des annales lorsqu’elles existent. Les services qu’y détenait l’Ordre n’ont fait qu’attiser davantage une polémique qui mérite quelques explications. Là encore, la présence mythique des Templiers s’accompagne de celle possible d’un trésor, propre à enflammer bien des imaginations et non des moindres. Ainsi, comme au château de La Gaude, où l’une des dernières propriétaires des lieux l’actrice Viviane Romance, nous avait confié avoir fait procéder à des sondages méthodiques, à l’occasion d’une importante restauration des lieux. Au Broc, le Temple possédait sa maison, y détenait 21 services, des droits divers dont la juridiction sur ses hommes, 1/16 de tous les bans tombés en commise et 5 redevances pour des habitations. Ce lieu figure comme une des possessions les mieux pourvues. Curieusement cette localité a été tenue à l’écart de la liste flatteuse des sites templiers, dressée par les auteurs à sensation et c’est peut-être là qu’existent les vestiges les plus authentiques, attestant de la présence de l’Ordre. Dans un acte de 1285, il est fait allusion aux droits pour les moins quinquagénaires du Temple dans le castrum du Broc. Sur appel du frère Bertrand Monnier agissant au nom du Temple de Nice, Grasse et Biot, le juge mage de Provence casse le 18 mai 1285 une sentence rendue par le juge de Nice, contre le frère donateur R. Jaubert qui avait empêché un homme du Broc, tenancier de l’Ordre d’obéir à la cour de Nice. Le 29 mai, sur appel du même frère, le juge mage casse une autre sentence rendue par le juge de Nice contre un habitant du Broc, P. Transtour, homme du Temple qui avait frappé Bertrand Canestrier, le commandeur G. Capion affirme à cette occasion les droits de justice de l’Ordre sur ses hommes dans ce castrum. Présent dès 1235 au Broc, le Temple va y exploiter ses biens jusqu’à leur saisie en 1308, avant qu’ils ne soient transmis à la commanderie de Nice des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem. En 1338, l’Hôpital y détient une maison et une chapelle héritées du Temple, 100 séterés de terre cultivée produisant 100 sétiers de méteil, 40 sétiers d’orge, s’y ajoutent 30 fosserées de vigne donnant 20 saumées de vin, 2 souchoirées de pré produisant 20 charges de foin, plus des cens et services représentant la coquette somme de 8 livres et 10 sous en argent, ainsi que plus de 5 saumées de vin. Cette estimation donne une idée du fructueux rapport de cette ancienne possession templière, trente ans après sa saisie. Sur un mamelon dominant la route reliant Le Broc à Bouyon, à trois kilomètres du village, s’élèvent les ruines de la  «commanderie ». Il s’agit d’un ensemble récemment répertorié par l’I.P.I.A.M. (Institut de préhistoire et d’archéologie des Alpes Maritimes). Trois bâtiments à étages, disposés en U, délimitent une cour intérieure, des salles voûtées sont encore apparentes aux étages inférieurs. Le bâtiment médian présente une ouverture ronde, formant rosace, orientée vers le Levant, il s’agissait probablement de la chapelle. Ce groupe d’édifices de facture médiévale, désigné comme une commanderie, dut être occupé tour à tour par les deux ordres militaires et religieux, les Templiers d’abord, puis leurs héritiers et successeurs les Hospitaliers. Dressée selon le plan classique d’une commanderie à vocation agricole, cette structure dispose ses corps de bâtiments autour d’une cour centrale fermée par une chapelle, chaque édifice ayant un usage particulier : habitation, étable, écurie, grange, caves, etc… Nous sommes là certainement en présence des restes authentiques de ce qui fut la «maison » de l’Ordre au Broc avec sa chapelle. Ces vestiges sont aujourd’hui en cours de restauration par leur nouveau propriétaire M. Santolaria.

Extrait des travaux de l’Institut de Préhistoire et d’Archéologie Alpes Méditerranée Mémoires, Tome XL, 2000, p. 125-138 Editions IPAAM (Christelle CARRON - Laurence LAUTIER)

A la demande du Service Régional de l'Archéologie, nous avons procédé, en 1998, à une campagne de prospection sur les territoires des communes de Bouyon, du Broc et de Carros. Il n'a pas été effectué de prospections systématiques mais une étude bibliographique puis une vérification sur le terrain nous ont conduites à des découvertes de sites nouveaux.   

La Commanderie (x: 987,57 y: 180,55 z : 562) : il s'agit d'un ensemble de trois bâtiments à étages, placés en « U » qui délimitent une cour intérieure. Aux étages inférieurs, des salles voûtées sont encore en place. Sur le bâtiment du milieu, présence d'une ouverture ronde en forme de rosace. Datation: il n'est pas impossible que l'ensemble ou une partie puisse remonter à l'époque médiévale. Cependant, si ce bâtiment a réellement appartenu à un groupe religieux, il est probable qu'il s'agissait des Templiers puis des Hospitaliers qui leur succédèrent.

Le Broc conserve donc les vestiges exceptionnels d’une authentique Commanderie templière, souhaitons qu’ à ce titre ils soient protégés comme un patrimoine historique évident.

 

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