07/10/2006
LOUPS : UN TEMOIGNAGE LEGENDAIRE
Il faisait froid et en rentrant des champs Aline s'étonna, après avoir tisonné les cendres de la cheminée, de constater que le feu était bel et bien éteint. Un seul remède: envoyer la petite Clotilde jusqu'à la maison la plus proche, avec un morceau de bois gras pour qu'elle rapporte la flamme.
Sans tarder, l'enfant partit d'un pas rapide dans le froid vif de cet après-midi de janvier, en suivant le chemin bordé de roures déplumés, plantés le long du canal.
Il fallait bien une bonne demi-heure de marche avant d'atteindre la maison des Giauffret. En cette saison, le sol gelé et les plaques de neige glacée ne facilitaient pas le trajet. Clotilde, emmitouflée dans sa pèlerine ne laissant apparaître que son nez retroussé et sa frange rousse, chantonnait pour se donner du courage.
Parvenue aux abords de la ferme, la visiteuse, flairée par les chiens, déclencha leurs aboiements hurleurs, bien vite apaisés par la voix calme du maître de maison.
Rémy s'avançait sur l'aire à la rencontre de la petite dont les galoches claquaient en écho sur les dalles sonores. Ils s'engouffrèrent dans la chaude demeure, suivis par les chiens rassurés. Tante Amélie, experte, enflamma le bois résineux pendant que Clotilde réchauffait ses mains engourdies par le froid. Lorsque l'enfant quitta les « Sagnes » le jour déclinait.
Le flambeau sautillant au rythme de ses pas disparut au détour du chemin, point lumineux attardé dans la nuit qui obscurcissait la vallée.
Aline, inquiète, remonta pour la troisième fois jusqu'au « Gourgeon » situé au-dessus de la ferme, d'où la vue dominante permettait une belle envolée sur les environs.
Le temps passait et la fillette ne revenait toujours pas. Maintenant la nuit noire s'imposait et il fallait se rendre à l'évidence: Clotilde s'était égarée sur quelque chemin de traverse. Le père et Étienne le fils aîné décidèrent donc d'aller à sa recherche. Quelques minutes plus tard à mi-chemin de chez Giauffret, les deux hommes, rassurés, aperçurent une lueur jaune se déplaçant dans leur direction.
Nul doute c'était elle qui s'avançait vers eux. Criant et sifflant, agitant leur lampe, ils se dirigèrent à grands pas vers la flamme qui s'immobilisait. Bientôt ils avaient rejoint Clotilde, gisant sur le bord du canal.
Son petit corps traîné, à moitié dévoré par les loups, s'éclairait aux lueurs tremblotantes du brandon qu'elle serrait dans sa main comme une ultime trace de vie.
Extrait des « Histoires de loups en Pays d’Azur » (Alandis-éditions Cannes), pour commander cet ouvrage de 18 € : téléphoner au 04 93 39 07 41.
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08:30 Publié dans MEMOIRE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : HISTOIRE
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