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23/12/2012

TENDE AU MOYEN ÂGE, DES SEIGNEURS JALOUX DE LEUR INDÉPENDANCE

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LES COMTES DE TENDE,DES SEIGNEURS JALOUX DE LEUR INDÉPENDANCE

La christianisation des vallées des Alpes-Maritimes est généralement datée du milieu du IVe siècle. Mais l'éclosion des premières églises rurales n'est située que beaucoup plus tard, vers 506-529. Les Wisigoths en 410 puis les Vandales autour de 450 auraient ravagé la côte contrariant ainsi la naissance de la nouvelle foi. Bien qu'un certain doute plane sur la venue réelle des Saxons et autres Lombards, on leur attribue vers 573 quantité de destructions avant que ne leur succèdent dès 737 les Sarrasins qui occupèrent le pays pendant plus de deux siècles, la Renaissance ne débutant qu'après leur départ en 980. Ainsi la religion chrétienne ne s'implantera avec certitude qu'autour de l'an mille après avoir été malmenée par les envahisseurs barbares et musulmans. Le genre de vie des montagnards dut évoluer très vite. Les campagnes se vidèrent, des regroupements se formèrent dans un souci de sécurité, puis les villages se ressérèrent autour des chapelles préludant aux premières paroisses. La relation du martyre de saint Dalmas en 250, dans la vallée du Gesso conduisant au Bégo, atteste de l'hostilité manifeste des indigènes romanisés à l'évangélisation. Plus tard, une légende rapporte la résistance opiniâtre des Tendasques assiégés par une troupe d'infidèles dans les murs de leur château, dont la tour de la « Maura » rappellerait le glorieux fait d'armes.

Si l'on suppose que des activités liées au commerce de la laine, donc de l’élevage, animaient déjà la haute Roya à cette époque, ce n'est qu'en 1002 que l'Histoire cite pour la première fois ces cantons isolés. Il s'agit d'un acte, où le marquis de Suse en Piémont accorde aux habitants de Tende, La Brigue et Saorge, certaines garanties attestées par leurs seigneurs les comtes de Vintimille. Il est intéressant de noter qu'à cette lointaine époque, les pâturages alpestres de la zone des Merveilles, inclus dans cet acte, dépendaient du Piémont, confirmant une influence concrétisée au cours du précédent millénaire. Les comtes de Vintimille, vassaux du marquis de Suse, possédaient alors la haute et moyenne Vésubie en plus des vallées de la Bévéra et de la Roya, c'est-à-dire toutes les vallées issues du Bégo. La frontière nord suivait la ligne des crêtes passant par le col de Tende. Au XIIe siècle, le comte de Provence acquerra la totalité des fiefs de la maison de Vintimille par des testaments successifs. Pourtant, une branche de cette dernière famille, les Lascaris, apparentés à l'empereur de Constantinople, contestera la propriété du comte de Provence. Après de sanglants combats et des fortunes diverses, la paix fut établie entre Charles I" d'Anjou, comte de Provence, et le seigneur de Tende, par acte du 18 décembre 1285. Les Lascaris seront seigneurs souverains de leurs terres de Tende, mais devront prêter hommage. aux comtes de Provence. Cet hommage garantira leur indépendance lorsque Nice passera à la Savoie en 1388, puis il sera transféré sur la personne du roi de France, lorsque les biens de la Provence lui seront légués en 1481. Ainsi, né de la désagrégation du comté de Vintimille, pris entre les deux impérialismes de Gênes et de la Provence, le comté de Tende s'imposera au XV e siècle, grâce à l'importance économique primordiale du col. Seul passage commode sur la voie commerciale des Alpes du Sud, les rivalités qu'entraînera sa possession conduiront les Lascaris de Tende à jouer un rôle appréciable dans la politique italienne. Concrétisé par l'existence d'une monnaie propre, Tende devint le centre d'une région économique, où l'exploitation du sol, l'élevage et le péage assurèrent une certaine prospérité. L'indépendance du petit Etat se maintint pendant près de trois siècles jusqu'en 1501 où la maison de Savoie l'acquit par un habile mariage avant de l'annexer en 1581. La communauté dispose à cette époque de la majeure partie du sol, sous la forme de forêts, pâturages et bandites, qu'elle exploite librement depuis le XI e siècle. C'est une agriculture dirigée, où, malgré l'altitude, châtaigniers, noyers et culture des grains donnent d'abondantes récoltes complétées par celles des cerises et des pommes. Au XIII e siècle comme dans l'Antiquité, le troupeau constitue l'élément essentiel de la vie économique du haut pays niçois. Des règlements établis au XV e siècle par le conseil de Tende indiquent d'une manière claire les dates, les lieux et le prix de location de chaque pâturage selon les espèces. Nous retrouvons sans doute, dans ces dispositions, le reflet d'anciens principes qui devaient régir la transhumance bien avant l'âge historique. Ainsi les vaches étrangères doivent séjourner à Casterino et payer deux sous par unité, d'autres alpages leur sont indiqués au Sabion, à Peirafica et à l'Omo. La montée à l'alpage s'effectue à la Saint-Jean et le retour a lieu à la fin août, et quelquefois à la Saint-Michel (30 septembre), pour pouvoir participer à la grande foire de la Brigue (1413). La vente des fromages de chèvres, tome ou brous, est également réglementée (1416). On apprend aussi (1419) que des gens de Tende offrent leurs services pour garder les vaches étrangères. En 1479, les étrangers peuvent venir estiver à Valaura sur les pentes du Bégo; ils doivent consigner leur bétail dans les trois jours après leur entrée sur le territoire et payer six gros par pastore de mouton et par vache. Le bétail ne peut descendre des alpages avant le 8 septembre (Nativité de la Vierge). La vie pastorale est organisée dans ses moindres détails, qu'il s'agisse de la vente du lait de chèvre en fin de semaine, de la garde des bœufs de la Saint-Michel à la Noël, ou du retour des troupeaux après leur hivernage en Provence. La location des bandites rapporte des revenus intéressants à la petite communauté; on apprend ainsi que le quartier de Donnigloxa (entrée du val d'Enfer) fut adjugé de 1444 à 1455 alors que les zones de la Vallée des Merveilles proprement dite et de la Valmasque semblent interdites. Les gens de Cagnes et des vals d'Oneille et du Maro (Ligurie italienne) figurent comme locataires habituels des bandites. Au XV e siècle c'est près de 21000 têtes de menu bétail qui estivaient sur les alpages de Tende; en 1424, on dénombre 218 vaches et 143 veaux étrangers. C'est surtout les bovidés qui constituent le cheptel étranger, venant de la proche Ligurie par le col des Seigneurs ou de la région d'Antibes et Cagnes. Cette présence détermine une activité économique fondée sur le commerce de la viande, du lait, du fromage, de la laine et des peaux. On consomme de la viande, deux cent dix à deux cent vingt jours par an, particulièrement de Pâques à la Noël et de la Noël au Carême, le mouton étant la chair la plus appréciée. La nourriture du paysan du Moyen Age est agrémentée par les vins du terroir et ceux importés de la Marche et de la Ligurie. Comme cela devait être le cas aux époques antérieures, le pain noir est répandu, ainsi que les produits provenant de la pêche en rivière et de la chasse. Ces dernières activités sont réglementées, par exemple la chasse à la perdrix est mise en adjudication tous les ans et deux types de filets sont autorisés pour la pêche en rivière. Les châtaignes et les fèves complètent cet ordinaire où le pain reste la base de l'alimentation. Une partie du grain est importée de Villeneuve-Loubet (froment, seigle, avoine). L'intérêt de ces mœurs médiévales, c'est de nous transmettre le reflet d'habitudes alimentaires et de courants d'échanges beaucoup plus anciens pouvant nous aider à mieux connaître la vie des premiers habitants de la haute Roya. Comme cela devait être le cas dans l'Antiquité, l'économie du comté de Tende est centrée sur l'exploitation de l'élevage et du bois. La laine entraîne la fabrication de tissus et le bois est expédié par flottage jusqu'à Vintimille, comme en 1462, lorsqu'il s'agit de réparer le palais épiscopal. La petite communauté retire également un revenu de l'extraction de la résine. Ce tableau de la vie de Tende au XV e siècle serait incomplet si l'on ne citait pas les activités commerciales liées au passage du col. Le péage enregistre les transhumances, l'expédition du bois, de la laine, des peaux et fromages, l'importation du vin et du grain, mais surtout le transit· du sel et autres marchandises de Nice au Piémont. Les comtes de Tende, placés sur la route reliant les États de Savoie du Piémont à leur unique débouché maritime du comté de Nice, vont jouer jusqu'en 1501 le rôle de portiers du pays niçois. Un lourd contentieux va opposer les marchands et voyageurs empruntant le col à l'administration des seigneurs de Tende. Les Lascaris se verront accuser de pratiquer des péages excessifs, de forcer le prix du fourrage et même d'interdire le passage pour des raisons malhonnêtes comme en 1407! Jusqu'au XVIIIe siècle la voie ne sera ouverte qu'au trafic muletier, entraînant une spécialisation des gens de Tende et la Brigue dans les activités de transporteurs, la location et l'élevage des animaux de bât. Véritable relais sur la route nord-sud, Tende verra se créer une corporation des muletiers, correspondant bien aux goûts nomades de sa population. Le trafic ira s'intensifiant pour mobiliser, en 1780, près de 50000 mulets afin de faire transiter annuellement le sel et les marchandises diverses de Nice au Piémont.  

D’après « Les Vallées du Soleil », pour commander cet ouvrage dédicacé de 15 € : contacteredmondrossi@wanadoo.fr

 

« LES VALLÉES DU SOLEIL »

EDMOND ROSSI RACONTE LES ALPES DU SUD

 

Qui dit montagne dit pays de l'étrange: partout, les lieux se sont réfugiés au cœur des régions montagneuses; en Europe comme ailleurs et depuis l'origine des hommes. Les Alpes sont un de ces massifs riches de traditions et de mystères. Le lieu central où s'est jouée cette rencontre entre une nature grandiose et hostile et des peuples fascinés et terrorisés par elle, ce sont les vallées. Celles qui permettaient le passage entre la mer et le cœur secret des massifs ont joué un rôle capital. Placé entre la lumière vive et la pierre chaude, cet ensemble méridional cloisonné forme une entité culturelle marginale méconnue. Oratoires isolés à la croisée des chemins, chapelles abandonnées aux murs couverts de dessins naïfs, fontaines rustiques jaillissant dans le creux d'un tronc de mélèze, anciennes bâtisses aux larges balcons sur­montés de curieux cadrans solaires, vastes constructions énigmatiques ... autant de messages qui parlent à notre esprit et à notre cœur, dans le langage simple des choses d'autrefois.Aujourd'hui, Edmond Rossi fait revivre la mémoire et la passionnante aventure des hommes de ces vallées perdues. Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

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