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19/11/2011

ROCCASPARVIERA, HISTOIRE D'UN VILLAGE MAUDIT

12 LES RUINES DE ROCCASPARVIERA.jpg

 

Roccasparvièra, “ La Roche de l’épervier ” (situé à une trentaine de kilomètres au nord de Nice et à 3 km au nord-ouest de Coaraze) dresse ses ruines confondues à la roche grise dont elle émane à 1100 mètres d’altitude, au-dessus du col Saint Michel reliant les vallées de la Vésubie et du Paillon.

Ce village fantôme porte l’empreinte de légendes sanglantes, où curieusement le crime se mêle à l’anthropophagie dans un contexte de vengeance. Au Moyen Age, ce lieu sera maudit par la reine Jeanne, après l’assassinat de ses enfants servis au repas du réveillon de Noël 1357. Plus tard, pendant les guerres de la Révolution, de sauvages barbets, réfugiés dans ses ruines, feront manger à des soldats français le cœur de l’officier meurtrier de leur père.

Véritable nid d’aigle ou plutôt d’épervier selon son nom, le village, dominé par les restes de son château, s’accroche sur une crête rocheuse surveillant le col, passage obligé d’une voie intervallée empruntée depuis les origines de l’humanité. Pour l’atteindre aujourd’hui à partir des routes modernes, il faut compter une bonne heure de marche, au départ du hameau de l’Engarvin au nord de Coaraze ou de Duranus.

Une cinquantaine de bâtisses ruinées s’entassent dans une enceinte, avec les traces d’un four et d’une citerne. Seule subsiste intacte, sur une plate-forme au sud, la chapelle Saint Michel, restaurée en 1924 sur les restes de la paroissiale.

La découverte de céramiques et de tuiles romaines atteste d’une occupation des lieux dès cette époque, probablement poste de guet. On y a même trouvé un silex taillé et une hache en serpentine verte polie, qui repoussent la fréquentation du site à des temps plus lointains (Néolithique).

Roccasparvièra pénètre pour la première fois dans l’Histoire dans deux chartes du XIIe siècle, recensant les paroisses dépendantes de l’évêché de Nice ; on y dénombre 15 feux en 1264 (environ 86 habitants). En 1271, l’église paroissiale est déjà dédiée à Saint Michel, pourfendeur du démon, exorciseur des lieux élevés, remplaçant souvent une divinité païenne de la montagne.

A la même époque, profitant de la faiblesse du pouvoir central, le premier seigneur augmente son autonomie avant d’être soumis brutalement comme d’autres feudataires de la région.

Le fief est confisqué en 1230 et racheté partiellement en 1239 par Guillaumes Richieri (Riquier), sans l’approbation de Raymond Bérenger V. L’enquête de Charles Ier de 1251 recense les droits et revenus du village avec exemption de corvées.

Le 6 Mars 1271, un des membres de l’illustre famille niçoise des Riquier prête hommage au souverain, ils seront coseigneurs de Roccasparvièra, avec un certain Faraud en 1309. Un état des feux de 1316 en attribue 26 à Roccasparvièra (67 à Coaraze) soit environ 150 habitants.

Une acquisition progressive du fief par le domaine royal devient définitive en 1351. Cette année là, l’église rapporte 14 sols de bénéfice au diocèse. Huit ans plus tard, Pierre Marquesant rachète la totalité du fief pour 700 florins d’or.

C’est à cette époque que se situe l’invraisemblable légende de la reine Jeanne. A la nouvelle qu’elle vient de manger le fruit de ses entrailles, elle s’enfuit comme une folle en hurlant des imprécations contre ce lieu maudit où s’est accompli un aussi abominable forfait : “ Rocca rouquina, rocca malina, un jou vendra que su la tieù cima, cantera plus gal ni galina ” (Roche rousse, roche méchante, un jour viendra où sur ta cime ne chantera plus ni le coq ni la poule).

Malgré cette malédiction, Roccasparvièra va poursuivre son destin dramatique quatre siècles durant. En 1364, peu rancunière, la reine Jeanne élève le fief au rang de baronnie. Mais la même année, une ravageuse invasion de sauterelles, entraînées par un vent chaud venu d’Afrique anéantit les cultures. Rien ne s’améliore, puisqu’en 1376 le compte de procuration déclare la petite communauté “ impuissante à payer l’impôt ”.

A la dédition de 1388, Roccasparvièra est noté comme un chef-lieu de baillie, sans château. Pierre Marquesant, accusé de trahison, voit ses biens confisqués en 1391. Après s’être disculpé, il sera réinvesti en 1399. Sa famille conservera le fief jusqu’au XVIIIe siècle.

Un donatif en faveur du comte de Savoie de 1408 signale 5 feux fiscaux (16 à Coaraze) soit une trentaine d’habitants.

Au XVIe siècle (1529, 1544, 1550, 1580), une série d’épidémies de peste emporte une partie de la population. On y élève alors une chapelle vouée à Saint Roch, saint anti-pesteux éprouvé.

Mais un sort funeste continue de s’acharner sur ce malheureux village, victime d’une suite de redoutables tremblements de terre qui vont détruire une partie des maisons et entraîner le début de son abandon : 20 Juillet 1564, un des plus violents de France, 31 Décembre 1612, suivi en 1618 d’importantes secousses étalées du 14 au 18 Janvier mettant bas maisons et église avec chutes de rochers.

L’abandon progressif de cette commune, qui aurait compté jusqu’à 350 âmes avant ces catastrophes (avec une administration communale et même un notaire à demeure puisqu’il y rédigeait ses actes en 1564) va s’échelonner tout au long du XVIIe siècle. Il peut encore s’expliquer pour diverses raisons : d’une part l’absence d’eau sur ces hauteurs au relief tourmenté où seules des citernes d’eau de pluie devaient permettre une vie précaire, d’autre part les destructions des tremblements de terre qui malmenèrent effroyablement les villages plantés sur le roc, notamment dans le massif hérissé entre Vésubie et Bévéra. De plus, ces séismes ont pu détourner les sources et décourager les habitants qui vivaient là d’une modeste agriculture.

Dès 1625, le départ s’amorce vers les vallées en répartissant les familles sur chacun des versants à Duranus et l’Engarvin.

Paul Canestrier indique : “ Les chefs de famille, les uns après les autres, désarticulèrent les maisons tremblantes, emportèrent poutres et tuiles, puis pièce par pièce, le four banal, le moulin et autres édifices publics ”.

Si en 1690 quelques irréductibles s’accrochent encore aux ruines, dix ans plus tard, seuls le curé et sa servante résideront au  chef-lieu avant de se résigner eux aussi à partir en 1723.

Mais avant cet abandon définitif, la chronique tragique de Roccasparvièra sera encore émaillée de bien des vicissitudes : assassinat du prêtre Ludovic Uberti par des brigands, maison curiale dévalisée à cinq reprises en 1697, nouvelle mise à sac en 1703 avec tentative de s’emparer des cloches ! Ce qui reste des statues, des tableaux et du mobilier de l’église sera déménagé le 10 Août 1723 vers Duranus où s’installe le desservant de la paroisse.

Dans le village, signalé ruiné et désert en 1749 et 1754, seules certaines bâtisses servent encore de remises ou de refuge temporaire pour des bandes de barbets pendant la Révolution. Enfin, leurs caves seront utilisées pour abriter les troupeaux avant que des bergers n’y affinent leurs fromages jusqu’au début de ce siècle.

Comme si la mémoire de ce village maudit devait elle aussi s’effacer, signalons enfin l’étrange disparition du registre des baptêmes, mariages et décès antérieurs à 1697, ainsi que du manuscrit de Don Jules Uberti, dernier prieur de Roccasparvièra. Document où il consigna l’histoire, les coutumes et les conventions de sa chère paroisse.

L’histoire tourmentée de Roccasparvièra, mêlée d’inquiétantes légendes, n’a pas fini de troubler le visiteur de ses ruines solitaires, où seule la plainte du vent dérange parfois le silence.

Bibliographie : La vie communale de Roccasparviera a été décrite par son dernier curé, Don Jules Uberti, originaire de la Bollène, qui laissa un manuscrit aujourd’hui introuvable. Plusieurs personnalités et auteurs l'eurent entre les mains, en particulier Augustin Carlone (1812-1873) qui le fit relier à ses frais, et surtout l'historien tourretan, Paul Canestrier (1888-1955) qui en fit l'objet d'une communication au Congrès des Sociétés Savantes de 1922.

Voir aussi, le tome XXVI de 1984 des « Mémoires de l’Institut de Préhistoire et d’Archéologie des A. M. »

 

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