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12/04/2006

SORCELLERIE

          SORTILEGES ET

 

 SORCELLERIES (2 ème partie)

 

Mais à côté de ces innocentes croyances populaires, confirmant un terrain propice à l' accueil de pratiques plus audacieuses, les chroniques du passé nous restituent les tragiques épisodes d'une impitoyable chasse aux sorcières. Les potences et les bûchers vont se dresser aux quatre coins du pays pour punir les malheureuses «mascas» accusées de pactiser avec Diable. En 1428: plusieurs femmes pendues devant la population rassemblée à Sospel. Dans la même capitale de diocèse en 1446, une femme sera brûlée vive à cause de ses maléfices. Plus haut, à Saint Etienne de Tinée, une femme et ses deux filles monteront sur le bûcher I 1437 pour crime de sorcellerie. Une autre sera pendue en 1451 à Nice. A cette époque l'Eglise pouvait rendre justice, ce privilège ne sera aboli en France qu'en 1790. Jusque là, particulièrement au XVème siècle, les autorités ecclésiastiques persécutèrent sans relâche tous ceux qui s'écartaient des préceptes par leur conduite, s'exposant par leurs égarements 1 'hérésie ou à la sorcellerie. S'il est admis «qu'il n 'y a qu'un sorcier pour dix mille sorcières et que la «masca» est du féminin, nombreux furent les hommes poursuivis devant ! tribunaux de l'époque pour les mêmes délits.

Les archives municipales de Nice rapportent le procès intenté à un Niçois accusé de sorcellerie au XVIème siècle. Le prévenu, Claude Trastor, âgé de 45 ans, apparaît à travers les témoignages comme un brave homme, toujours empressé à rendre service et à faire le bien. Couturier de son état, sachant lire et écrire, il avait été commis à la garde d'une des portes la ville du côté du Paillon. A la faveur des nuits de ronde il exhibait devant ses collègues des manuscrits couverts de signes mystérieux, de caractères tracés avec plusieurs encres couleur, ainsi que des triangles de bois aux vertus occultes. Ses vantardises vont l'entraîner à comparaître le 7 avri11598, devant le tribu ecclésiastique. «Une partie de ces objets, déclara-t-il, m'a été confiée par un ami spirite I fait venir les esprits dans un miroir, dans une cruche ou sur une poêle à frire, et qui corn des secrets contre les arquebusades». Il avouera aussi avoir reçu du père Jean de Gattières, ouvrage des plus suspects: «La Scienza di Normandia». Une perquisition des gardes domicile de Trastor entraîne la découverte d'une bibliothèque des plus sulfureuses: ouvrage de Corneille Agrippa, célèbre sorcier de la Renaissance, médecin de François «De occulta philosophia», d'un livre de divination, version latine de la «Clavicule Salomon», véritable bible de la sorcellerie de l'époque, ainsi qu'une collection de corde~ pendus destinées à «nouer l'aiguillette» et d'autres feuillets couverts de signes ésotériques (pentacles, cercles). La possession d'ouvrages interdits, de manuscrits proscrits et d'instruments destinés à la magie, allait causer le plus grand tort au malheureux Trastor. Président du tribunal, l'évêque Pallavicino de Ceva, siégeant au palais épiscopal s'inquiéta de savoir s'il connaissait des paroles capables de détourner les femmes de la vertu ou d'enchanter les armes, ou s'il possédait un remède pouvant faire boiter les chevaux ou les empêcher de marcher. «J’ai communiqué, répondit le prévenu, des recettes contre la torture, la fièvre quarte, les saignements de nez et pour enchanter l'épée d'un ennemi. Mais je n'en ai jamais fait moi-même l'expérience». «A quel usage servent vos triangles de bois ?», demanda le Président. Trastor expliqua que ces baguettes remises par une relation, devaient être plantées à l'endroit où un homme avait uriné pour lui interdire ensuite d'avoir des relations avec les femmes! Et les cordes des pendus ? Celui qui faisait dire trois messes du Saint Esprit sur elles, ou qui en tenait une à la main en jouant à la balle s'assurait la chance de gagner. De plus «quand je donnais des secrets, je disais aux personnes qu'elles avaient besoin d'y croire, que, autrement il n'y aurait pas d'effet». Certains tours lui avaient été communiqués par un nommé Gallo, notamment pour détourner les arquebusades. Cette dernière recette s'avéra inopérante puisque Gallo mourut précisément victime d'un coup d'arquebuse. Selon ce même Gallo, les formules magiques pour être efficaces devaient être tracées sur la peau tannée d'un fœtus de chevreau. Toute la durée du procès, Trastor craignit d'être expédié par l'évêque dans les flammes de l'Enfer via celles du bûcher. Aussi répétait-il à ses juges: <="" de="" repens="" me="" je="" et="" catholique="" suis="" mais="" mille.="" mais="" fois="" une="" non="" mourir="" mérité="" />  Bien que convaincu de crimes, de sacrilèges, divinations, on ne le condamna qu'à les détester et à y renoncer pour l'avenir. Le tribunal ecclésiastique fit preuve de clémence, fait rare pour un procès de sorcellerie à cette époque. Tout son arsenal de sorcier fut brûlé et on imposa au condamné confession et communion chaque mois trois années durant, de jeûner chaque samedi et de réciter ce même jour à genoux les sept psaumes de la Pénitence et les litanies. Banni du diocèse pour trois années avec menace de galères à vie s'il y revenait, le couturier niçois épris de sorcellerie, poursuivit un destin sans histoire à l'écart de la chronique judiciaire de son temps.  

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