16/05/2013
A LA GAUDE, UNE BIEN TRISTE FIN...
A La Gaude, « Pied-blanc », le chien berger des Bonifacy était connu et estimé de tous pour son caractère sociable et ses manières affectueuses, particulièrement à l’égard des enfants qui le lui rendaient bien.
S’il aimait les accompagner un temps à l’occasion de la traversée du village, il ne négligeait jamais sa fonction de gardien du troupeau familial plus de quelques minutes. Cette manifestation de sympathie était pour lui une marque de courtoisie à l’égard de ceux que son maître désignait sous le nom de « minots ». Lesquels savaient récompenser les attentions de l’animal par quelques friandises telles qu’un os ou un morceau de pain.
Il faut dire que le père Bonifacy, bourgeois économe, ne brillait pas par ses largesses à l’égard d’Antonin son valet de ferme. Ce dernier, bien souvent, partageait sa soupe avec son précieux auxiliaire à quatre pattes, pour parvenir à le nourrir.
Aussi, le malheureux « Pied-blanc »n’avait que la peau sur les os, mais bien qu’efflanqué, il persistait à s’acquitter de ses tâches avec courage et un sens évident du devoir.
La vie de « Pied-blanc » se déroulait chaque jour entre un aller matinal vers les pâturages des Serens et des Vaquières et un retour au déclin du jour vers l’étable du Trigan. Encadrant deux douzaines de chèvres et une centaine de moutons, le chien attentif avait fort à faire pour conduire son troupeau au long des chemins, sans qu’il ne s’égare vers quelques parcelles de particuliers bougons.
Jappant allégrement et mordillant les pattes des récalcitrants, « Pied-blanc » faisait preuve d’autorité et d’une habileté indiscutable pour conduire sa petite troupe sans encombre au terme du déplacement.
Nous étions parvenus ainsi à la mi-février de l’année 1870. Il faisait froid et les montagnes environnantes avaient revêtu leur manteau de neige depuis la Noël. L’hiver ne désarmait pas enfermant la campagne dans une étreinte glacée, aussi dans ces conditions plus question de sortir les bêtes de l’étable.
Comme la réserve de foin s’amenuisait, bêtes et gens attendaient impatiemment la fin de l’hiver.
Le matin du 22 février, un timide soleil réchauffant enfin l’atmosphère, Antonin décida de reprendre à l’aurore le chemin des Vaquières.
Le sol gelé et les taches blanches de la neige persistante avaient transformé le paysage de la campagne. «Pied-blanc», fidèle compagnon du berger, s’affairait fier de pouvoir reprendre ses fonctions.
L’après midi un vent sournois souffla du Nord, apportant depuis les Baous la menace de lourdes nuées. Bientôt une bourrasque gonflée de flocons de neige tourbillonnants s’enroula autour du berger et de son troupeau. Aveuglé, mais décidé à revenir au village coûte que coûte, Antonin défia la tempête harcelant de la voix son pauvre chien qui se démenait plus que jamais.
Le ciel s’était assombri au point de masquer la lumière du jour, rendant encore plus difficile la progression du troupeau
Soudain des aboiements furieux déchirèrent l’épaisseur de la tourmente, très vite suivis de grondements de colère, puis de cris de douleur s’achevant en une longue et faiblissante litanie faite de : "Kaiii, kaiii, kaiii " à fendre l’âme.
Antonin égaré, persistait sans succès à appeler «Pied-blanc» désormais muet.
Parvenu au village avec une partie de ses bêtes mais sans son chien, le berger apparut comme un héros après sa tumultueuse aventure.
Le père Bonifacy jugea très mal son valet de ferme, lui reprochant son manque de discernement dans une pareille circonstance.
« Antonin vous êtes un irresponsable, retournez là-bas sans tarder et ramenez les bêtes avec l’aide du chien qui a dû s’égarer. Il doit vous attendre mort de peur. Vous me rendrez compte des bêtes manquantes, perdues à cause de votre stupide négligence. »
Arrivé aux Vaquières, Antonin retrouva le pauvre « Pied-blanc » mort égorgé et en partie dévoré par un loup, lequel profitant de la panique engendrée par la bourrasque, s’était attaqué à la queue du troupeau. Trois autres moutons avaient subi le même sort.
Préjugeant de ses forces, le courageux « Pied-blanc » avait vaillamment combattu jusqu’à la mort, pour défendre ses chers moutons.
Rentré au Trigan la larme à l’œil, Antonin confia son désarroi à un maître insensible qui l’accabla encore, lui reprochant son inconscience.
« Vous n’avez pas de jugeote et tout ça est de votre faute, comment allons- nous faire maintenant privés de chien ? Sans parler de mes trois brebis offertes à l’appétit du loup !»
Au village, chacun regretta la disparition du brave chien des Bonifacy, aimé de tous.
Aussi, comme en hommage à «Pied-blanc» et pour mieux alerter les gens du lieu après cet événement tragique, ce quartier de La Gaude se nomme depuis « Les Vaquières et Le Loup » comme si ce territoire restait acquis à ce féroce animal.
EXTRAIT DES "HISTOIRES ET LÉGENDES DES BALCONS D'AZUR": LA GAUDE, SAINT JEANNET, GATTIÈRES, CARROS, LE BROC, BÉZAUDUN, COURSEGOULES, TOURRETTES SUR LOUP, VENCE, SAINT PAUL DE VENCE, LA COLLE, ROQUEFORT LES PINS, VILLENEUVE LOUBET, CAGNES...
De La Gaude à Vence et au Broc, le vaste belvédère qui surplombe la Méditerranée et le Var reste méconnu. La région provençale des « Balcons d'Azur » renferme pourtant des trésors historiques et architecturaux qu'il est urgent de découvrir, au-delà de la splendeur des paysages. C'est à ce voyage insolite que nous invite l'auteur, le long d'un amphithéâtre, au cœur duquel s'égrènent les célèbres fleurons de LA GAUDE, VENCE, SAINT-JEANNET, GATTIÈRES, CARROS, LE BROC.
Passant tour à tour de la réalité des faits historiques, chargés de fabuleuses anecdotes, aux légendes, Edmond Rossi, auteur de divers ouvrages sur le passé et la mémoire des Alpes-Maritimes, a recueilli et réuni quelques moments singuliers de ces villages.
Le choix de La Gaude s'impose comme le centre de gravité de ce « triangle d'or» d'une richesse exceptionnelle. Aux limites de ce secteur, des vestiges témoignent également d'un passé où l'insolite nous interpelle pour mieux conforter la légende: chapelle oubliée de COURSEGOULES, fayard de BÉZAUDUN, tombeau mystérieux de TOURRETTES-SUR-LOUP, ruines austères de VENCE ou cachées de ROQUEFORT-LES-PINS, sentinelle fortifiée de SAINT-PAUL et abbaye de LA COLLE, châteaux de VILLENEUVE-LOUBET et de CAGNES.
La Gaude, célèbre pour son vin sera aussi l'inspiratrice de Marcel Pagnol pour sa « Manon des Sources ». D'Hercule à d'Artagnan venu arrêter le marquis de Grimaldi à Cagnes, laissez-vous guider par les fantômes des personnages, pour parcourir les vivantes ruelles de ces villages et la riante campagne alentour. L'agréable découverte de ces bourgs authentiques aux limites de la Provence, vous révélera bien d'autres trésors, dignes de ceux cachés là par les Sarrasins et les Templiers, bien présents dans tout ce secteur.
Ce livre est édité par les "EDITIONS CAMPANILE" http://www.editions-campanile.fr
avec possibilité d'y être commandé.
Ouvrage illustré, de 160 pages, également disponible dans toutes les bonnes librairies au prix de 18 € et dédicacé par l'auteur, en contactant: edmondrossi@wanadoo.fr
10:35 Publié dans Découverte du Pays d'Azur, HISTOIRE, Livre, MEMOIRE, TRADITION | Lien permanent | Commentaires (0)
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