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01/06/2012

FALICON: LA MYSTÉRIEUSE PYRAMIDE

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Au nord de Nice, à une centaine de mètres à gauche, après le carrefour de l'Aire Saint Michel, sur la route du petit village de Falicon, un chemin conduit au vieux hameau des Gaïnes, de là, un sentier balisé aboutit en un quart d'heure à un gouffre naturel dominé par une pyramide de sept à huit mètres de côté au sommet très abîmé.

L'ouverture de la grotte ainsi qu'une face de la pyramide qui la surmonte sont sensiblement orientées au sud. De ce fait, au début de l'été (solstice), les rayons du soleil éclairent l'intérieur.

La grotte des «Ratapignata» (chauves-souris en niçois) se compose de plusieurs salles. La première, accessible par une échelle de corde, est une vaste rotonde de 22 m sur 15 au centre de laquelle s'élève une énorme stalagmite semblable à une statue.

A l'ouest, une autre gigantesque concrétion est soudée au plafond comme une colonne. Au sud, un escalier de sept marches descend vers une plateforme recouverte de pierrailles. Au nord, une petite ouverture en fente permet d'accéder à l'étage inférieur où dans une seconde salle une rigole recueille un filet d'eau. Près de l'escalier, au pied d'une paroi verticale de forme triangulaire, s'ouvre une étroite fissure qui débouche sur une vaste salle, basse de plafond.

La première mention historique de la grotte et de sa pyramide remonte à 1804. Un certain Domenico Rossetti, avocat siennois, amateur d'antiquités, venu à Cimiez, décrit dans un poème en trois chants d'une centaine de vers, la grotte ouverte sur les flancs du «Monte Calvo» (le Mont Chauve) par où s'échappent le soir des nuées de «ratapignata»: la renommée des lieux est faite.

Au XIXème siècle, les monographies et les guides qui suivent citent désormais la «Grotte des Ratapignata» en ignorant souvent la pyramide et l'escalier à sept marches. Un piton de fer et des arceaux sont scellés pour faciliter la descente.

Avant la dernière guerre, des articles commencent à émettre l'hypothèse d'un lieu de culte (Pythonisse) de l'époque romaine ou, plus obscur, remontant «très haut dans la nuit des temps».

En 1970, une importante étude de Maurice Guinguand «Falicon, pyramide tem­plière, la Ratapignata» lance la question sur le terrain des théories douteuses rejetées par le monde scientifique. S'y mêlent l'astrologie, l'occultisme et des notions historiques discuta­bles.

Six ans plus tard, Henri Broch récidive dans «la mystérieuse pyramide de Falicon». Examinant tour à tour les différentes hypothèses d'un lieu de culte celtique ou romain, il penche lui aussi en faveur d'une fréquentation des lieux par les Templiers. Son raisonnement se base sur la découverte, à proximité de la grotte, d'un tunnel souterrain relié à un puits comblé. Bien que de tels captages de sources soient communs dans la région depuis l'époque romaine, il n 'hésite pas à y pressentir le passage des Templiers. Son opinion s'appuie sur une légende véhiculée dans le quartier selon laquelle: «les Templiers qui ont occupé la Bastide (voisine) connaissaient l'existence d'un souterrain menant à une salle du gouffre et y ont enfoui un butin».

Face à ces suppositions laissant la part belle à l'imaginaire, quelles sont les réalités archéologiques tangibles de la grotte et de sa pyramide? Pierre Bodard, scrupuleux interprète du très sérieux «Institut de préhistoire et d'archéologie des Alpes Maritimes», en dresse le bilan en 1970.

Il cite la découverte de quelques ossements fossiles d'ours des cavernes recueillis en 1851 par le Dr Naudot. Puis, il s'intéresse aux deux monuments: la pyramide et l'escalier intérieur, posant la question capitale de leurs origines. Malheureusement, l'analyse des mortiers des deux constructions n'a pas permis de conclure qu'ils soient contemporains; par contre les matériaux de la pyramide et des marches (grès) sont semblables. Reprenant ensuite les vestiges découverts alentour: stèles funéraires, tuiles, point de départ de l'aqueduc alimentant l'antique Cemenelum (Cimiez), P. Bodard y inclut la Pyramide de Falicon dans un vaste ensemble d'origine gallo-romaine. Il écarte ensuite l'hypothèse templière, cet ordre n'ayant pas eu de possessions répertoriées en ces lieux par les spécialistes.

Les fameux signes gravés vus par certains, se limitent à un A visible sur le revêtement de la face sud de la pyramide. P. Bodard écarte le reste: figure humaine de la grande stalagmite (Baphomet pour d'autres !), les croix et autres svastikas qui ne seraient que des concrétions adventives ou des fissures naturelles. Puis faisant la part des hypothèses fondées sur des éléments connus et acquis et, des suppositions de l'archéologie-fiction, P. Bodard adopte l'idée que l'ensemble pyramide-escalier constituerait les restes d'un temple dédié à Mithra. Il développe ensuite son idée en précisant ce grand culte rival du christianisme qui s'étendit dans l'Empire romain dès l'aube du IIème siècle après J.C.

Fondé sur le sacrifice du taureau (taurobole), ce culte s'exerçait de préférence dans une cavité naturelle ou dans un temple obscur (mithreum) près desquels devait couler une source. L'ouvrage «Mithra, ce dieu mystérieux» du Dr M. Vermaseren spécialiste de la question précise encore: «En Iran déjà, Mithra était belliqueux de caractère, toujours paré au combat et prêt à assister ses compagnons dans la lutte pour le Bien et à les mener à la Victoire. Dans ses mystères, l'un des grades est «miles»: soldat; son culte est un service militaire et la vie, ici-bas, une campagne au service d'un dieu victorieux. Que des légionnaires romains de tous grades, souvent aussi en provenance du Levant, se soient sentis attirés par Mithra n'est donc pas étonnant. A tous ceux qui s'engageaient sous les aigles romains, le dieu pouvait prêter son puissant appui. Cette assistance sur le champ de bataille ainsi que la discipline militaire qu'il exigeait furent des facteurs importants dans la propagation du culte de Mithra et sa reconnaissance officielle. Il suffisait que les aigles romains soient plantés dans un «castrum» pour que le culte de Mithra s'y installa aussitôt; ce fut indubitablement ce qui se passa à partir du IIème siècle après LC.».

Puis s'intéressant au lieu du culte, il ajoute: «La grotte symbolise la voûte céleste ...

L'idée dominante est toujours de représenter le dieu Mithra tauricide dans une grotte ... Le chiffre sept reçut, dans le culte de Mithra, une signification dominante. Certains reliefs des régions danubiennes représentent sept cyprès (arbres solaires) alternant avec sept poignards, coiffés d'un bonnet Phrygien. A Doura sept marches donnent accès à la niche rituelle ... Souvent le temple était orienté vers le Levant pour permettre aux premiers rayons du soleil d'y pénétrer par une fenêtre ou une ouverture pratiquée dans la voûte et de frapper directement l'effigie du dieu».

Toutes ces données caractéristiques se retrouvent à Falicon: les sept marches correspondant aux sept degrés de l'initiation mithraïque accédant à la plateforme sur laquelle le prêtre pouvait officier, le filet d'eau de la source de la salle voisine, L'ouverture méridionale de la grotte vers le soleil, reste la pyramide?

Bien que compatible avec ce culte oriental véhiculé par les légionnaires séjournant tout près de là, à Cemenelum, rien ne prouve qu'elle soit contemporaine de l'escalier intérieur, ni nécessaire à la destination religieuse de la grotte.

La réponse nous est donnée avec preuves à l'appui par un autre membre éminent de l'Institut de Préhistoire et d'Archéologie des Alpes Maritimes. Dans le tome XIII des Mémoires de cette société, le Dr C.R. Cheveneau rapporte que le long du chemin conduisant de Cimiez à Falicon des tombes romaines décorées de gravures de comus (têtes de boeufs avec cornes, ou cornes seules comme au Bégo) et des sarcophages avec glaives et croix (emblèmes du culte de Mithra) ont été mis au jour voici quelques années. Plus loin, il précise qu'au IVème siècle, une légion provenant d'Alexandrie vint tenir garnison à Cimiez, dès lors tout s'éclaire ! Mithra était particulièrement à l'honneur en basse Egypte, il n'est donc pas étonnant que ces légionnaires aient aménagé un lieu pour pratiquer leur culte selon les rites et même qu'ils aient édifié une pyramide comme chez eux pour réhausser le temple.

Donc une pyramide construite par d'authentiques Egyptiens bien loin de leur pays, on ne peut que rêver sur cette antique témoin égaré, menacé aujourd'hui par de multiples dégradations.

 

D’après « Les Histoires et Légendes du Pays d’Azur », pour commander cet ouvrage dédicacé de 15 € : contacteredmondrossi@wanadoo.fr

 

Des histoires extraordinaires naissent sous tous les cieux, mais seul un cadre favorable les fait éclore.

La situation géographique du Pays d’Azur où les Alpes plongent dans la mer dans un chaos de montagnes et de vallées profondes lui confère déjà un caractère exceptionnel. Les climats qui s'y étagent de la douceur méditerranéenne de la côte aux frimas polaires des hauts sommets sont tout aussi contrastés. Si l'on ajoute que l'homme a résidé sur ces terres d'opposition depuis ses origines, on ne peut s'étonner de trouver en lui la démesure du fantastique révélée par les outrances du décor.

Cet environnement propice ne devait pas manquer de pro­duire dans la vie de ses habitants une saga où l'imaginaire rejoint naturellement la réalité.

Depuis les milliers d'étranges gravures tracées à l'Age du Bronze sur les pentes du Mont Bégo dans la Vallée des Merveilles, en passant par les fabuleux miracles de la légende dorée des premiers chrétiens, ou les fresques tragiques des chapelles du Haut-Pays, jusqu'aux héroïques faits d'armes des Barbets pendant la Révolution française, longue est la chronique des «Histoires extraordinaires» du Pays de Nice, s'étalant dans la pierre et la mémoire de ses habitants.

Par un survol du passionnant passé de cette région, qu'il connaît bien, Edmond Rossi nous entraîne à travers une cinquantaine de récits mêlant la réalité historique au fantastique de la légende.

Rappelons qu'Edmond ROSSI, né à Nice, est entre autres l'auteur de deux ouvrages d'Histoire appréciés, dont «Fantastique Vallée des Merveilles», d'une étude sur les traditions et le passé des Alpes du Sud: «Les Vallées du Soleil» et d'un recueil de contes et légendes de Nice et sa région: «Entre neige et soleil».

 

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