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11/02/2016

A SAINT MARTIN D’ENTRAUNES:DAOU TEMPS QUÉ BERTA FILAVA !

 

SAINT MARTIN D'ENTRAUNES.jpg

Dans le passé, le travail des textiles dans les hautes vallées des Alpes-Maritimes s'est longtemps limité à la satisfaction des besoins locaux ; on tissait le chanvre et la laine produits sur place. Mais bientôt, la montagne se spécialise dans l'industrie lainière. Les longs mois d'hiver obligent à s'enfermer ; cela favorise la production qui augmente très vite, nécessitant même l'exportation de produits finis. Ces pratiques débutent dès le XVIIème siècle dans la Haute Tinée et le Haut Var, principalement dans le Val d'Entraunes dont le débouché principal est le Piémont. Le Haut Verdon suit, il expédie ses draps dits "cordeillas" dans le Dauphiné, la Savoie et même Gênes et l'Italie. Au XVIIIème siècle, ces mêmes régions exportent vers les ports de la Provence et du Pays niçois. Cette vitalité est menacée au XIXème siècle où un effort d'amélioration s'avère nécessaire. Mais l'ouverture des communications va précipiter le déclin de cette brillante industrie.

 Dans le Val d'Entraunes, comme dans la vallée de Barcelonnette, on utilisait le rouet contrairement aux autres communautés "lainières" comme Guillaumes, Péone, Beuil, Ilonse, Isola, St Etienne et St Dalmas le Selvage. Au XVIIIème siècle, Entraunes était déjà spécialisé depuis des décennies dans la fabrication de draps "cadis et droguets" dont la réputation débordait le milieu régional. Toute la population s'employait dans le cadre familial où chaque foyer possédait un métier manuel. Les pièces de drap rapportaient 40 francs l'une, se vendaient au poids (35 livres) et devaient, avant leur expédition, subir un sérieux contrôle de la part des consuls, qui s'assuraient de leur conformité avec les règles fixées par le roi de Sardaigne. Des règles dont beaucoup souhaitaient s'affranchir pour produire, comme en France, des étoffes plus fines, plus légères qui, à dimensions équivalentes, exigeaient moins de laine et rapportaient davantage. En 1843, des inondations catastrophiques portent un coup fatal à l'industrie lainière d'Entraunes ; St Martin d'Entraunes va alors prendre activement le relais

 L'usine des "Clots", située au bord du Var au nord du village, avait été créée en 1830 par François Ollivier ; elle employait toute l'année une quinzaine d'ouvriers de St Martin, logés sur place dans un bâtiment spécial. Chacun possédait un bout de jardin et prenait le bois dans la propriété, le tout pour 50Frs par an.  

 On ne tissait que la pure laine qui provenait des moutons de tout le canton de Guillaumes. La laine était achetée aux bergers à l'occasion des foires. L'usine fermera ses portes en 1906.

 Différentes opérations se déroulaient dans la fabrique. A l'arrivée à l'usine, la laine était lavée à grande eau dans des tonneaux à double parois.

Puis elle était séchée sur des claies de bois et stockée ensuite dans une vaste pièce. Suivait le cardage, consistant à démêler la laine à l'aide de peignes en fer  de plus en plus fins. La cardeuse était mue par l'eau du Var, il s'agissait d'une roue sur laquelle étaient fixés les peignes.

Une nouvelle machine procédait après cela au filage, qui avait pour but d'obtenir un fil torsadé s'enroulant sur de grosses bobines. Ces différentes machines étaient construites en bois et la transmission du mouvement s'effectuait à l'aide de poulies et de courroies.

Mise en écheveaux, la laine était ensuite trempée dans des préparations de différentes couleurs (bleu, rouge, marron, jaune, noir, blanc et gris). Les teintes naturelles extraites d'animaux ou de végétaux faisaient l'objet de secrets jalousement gardés par M. Ollivier.

Après avoir été séchés sur des barres de bois, les fils de laine étaient tissés à l'aide d'une navette. Un rasage des tissus supprimait les petits fils qui dépassaient. Enfin, on repassait les pièces obtenues avec des fers chauffés sur la braise.

Les pièces produites, servant à la confection de couvertures et de vêtements, étaient ensuite livrées dans toute la région, grâce à des charrettes tirées par des chevaux.

Il existait à Puget-Théniers une succursale de la maison Ollivier, située au-dessus de l'ancienne tannerie des cuirs. D'autres points de vente comme Barcelonnette, St. Etienne de Tinée, Guillaumes, Sospel et Nice offraient les produits élaborés à St. Martin d'Entraunes.

 

De nos jours, les bâtiments désaffectés dressent encore fièrement leurs façades rappelant une réalité industrielle oubliée qui anima trois quarts de siècle durant le village alpin de St. Martin d'Entraunes.

Pour découvrir ce petit village situé à une centaine de kilomètres de Nice vers les sources du Var remonter cette même pittoresque vallée. Sur place, des hôtels et restaurants pourront vous accueillir, ainsi qu'à la petite station d'altitude de Val Pélens (1600m), à huit kilomètres du village, sur la route du col des Champs.

Extrait de « Histoire et Patrimoine des vallées du Mercantour » Edmond Rossi (Éditions des Régionalismes 2014), pour en savoir plus contact :

edmondrossi@orange.fr

Pour en savoir plus sur un village typique chargé d’anecdotes et d’images du passé : Cliquez sur

http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com  

08/02/2016

ÉMISSYON DE TÉLÉVJSION À VOIR

A ne pas manquer, ce mardi 9 février à 20h 50 l’émission de télévision sur RMCdécouverte (Canalsat 98 ou TNT 24), à propos des « Lieux mystérieux de la France » où je présenterai le village maudit de Roccasparvuèra, proche de NICE ;

Edmond ROSSI

 

01/02/2016

PONT DE LA MARIÉE

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« Nul ne peut se sentir à la fois responsable et désespéré »

Saint Exupéry

 AU « PAYS DES ROCHES ROUGES » : LE PONT DE LA MARIEE

Les abyssales gorges de Daluis, taillées dans les roches rouges, constituent un site touristique réputé encore hanté par une dramatique histoire vraie.

A la sortie des gorges, en remontant la vallée du Var, surplombant le précipice, une croix noire plantée dans les schistes rouge sang, immortalise un tragique événement.Que s'est-il passé le 30 juillet 1927 ?

Ce jour là à Guillaumes arrive sur la place une superbe voiture américaine, les voitures sont plutôt rares et ne passent pas inaperçues. Un couple descend du véhicule, ils ont retenu une chambre à l 'hôtel. Les indiscrétions dans le village vont bon train. Il ne s'agit ni d'un prince ni d'une princesse mais d'un couple en voyage de noce des « gens très riches » au pourboire facile, gage de considération.

Une enquête nous a permis de connaître le nom du marié : Bernard Baillet, sans profession, domicilié au Vésinet ( Seine et Oise), son épouse, une jeune parisienne, Marie-Louise PION, née le 5 février 1905 avait âgée alors de 22 ans.

A 21 heures ce soir là, le couple déclare à l'hôtelier qu'il désire visiter les gorges.

La puissante limousine balaye la route de ses phares. La voiture s'arrête à l'entrée des gorges, devant le pont qui enjambe le Var reliant les deux routes. Sa hauteur de 80 mètres en fait le point le plus vertigineux des gorges.

A 22 heures, la grosse voiture revint à toute vitesse au village, un homme affolé en sort en déclarant que son épouse, trompée par l’obscurité, a sauté le pont.

Les secours s'organisent immédiatement sous la conduite du brigadier chef Olivesi. A la lumière blafarde des fanaux, on fouille les gorges, mais à minuit par sécurité les recherches sont abandonnées.

Tout reprend le lendemain à l'aube. Au jour naissant, 80 mètres plus bas, dans les remous du Var, le corps de la jeune mariée est repéré.

Aucun témoin à ce drame, si ce n'est un rayon de lune. L'enquête, se référant au dire du mari, conclut à l'accident. Pourtant on chuchote. On trouve dans l'attitude du mari des bizarreries qui ne sont peut être au fond que le reflet du chagrin.

Mais quand même, pourquoi une craintive femme se serait approchée du seul endroit où le garde-fou est inexistant. On s'étonne que son époux ne fut point à ses cotés durant cette promenade, prêt à la rattraper immédiatement dans le cas d’un faux pas. Bien d’autres points surprennent !

Seuls, la nature, Dieu et les deux protagonistes, étaient témoins. La mariée a emporté son secret dans le gouffre des gorges, si secret il y a.

Sur les registres de l'état civil de Guillaumes, l'enregistrement de ce décès fut fait sur la déclaration du menuisier du village.

Ce drame servit la cause du tourisme naissant. Le pont du tramway fut renommé « le pont de la Mariée ».

Donc pas de légende de jeune femme venue se suicider le soir de son mariage, faute de pouvoir épouser celui qu'elle aimait. Pas davantage de légende de seigneur et princesse. A la base de tout cela un drame banal, un accident stupide, après tant d'années acceptons simplement la version officielle.

Aujourd’hui, si certains assurent avoir aperçu la blanche silhouette fantômatique de la mariée déambuler sur le pont les nuits de pleine lune, d’autres plus audacieux s’élancent dans le vide du haut du pont accrochés à un élastique comme un défi au tragique souvenir de la malheureuse mariée.

 Extrait des « Contes et Légendes du Pays d’Azur » Edmond Rossi (Éditions Sutton), contact :

 edmondrossi@orange.fr